Accueil La filière hippique française transforme les courses de chevaux en jeu vidéo

La filière hippique française transforme les courses de chevaux en jeu vidéo

» Innovation

« Il fallait moderniser l’image des courses
et il nous a semblé que le tracking pouvait fortement y contribuer. »

Céline Blache, PMU

 

Avec EpiqE Tracking, une application de géolocalisation des chevaux engagés dans une course, les acteurs de la filière hippique, dont le PMU, font entrer les courses dans l’ère numérique. L’utilisateur est plongé au cœur de l’action via le live 3D et accède aux performances de ses chevaux préférés. Derrière cette innovation se cache Thales, sur lequel s’est appuyé EpiqE Tracking, pour fournir tout le traitement Big Data en temps réel.

 

Il n’est plus aujourd’hui aucune retransmission sportive à la TV où l’on n’affiche en temps réel la position de chaque concurrent, sa vitesse, ses statistiques. Course de F1, Tour de France ou Coupe de l’America, les téléspectateurs veulent disposer d’un maximum de données pour apprécier les performances de leurs champions préférés. C’est aussi désormais le cas de la course hippique, sport où la donnée est reine.

Vivre les courses de l’intérieur

Projet lancé par la filière hippique française (LeTROT, France Galop, Equidia, La Fédération Nationale des Course Hippiques et le PMU) le projet EpiqE Tracking se traduit pour le grand public par des applications mobiles pour iOS Android et casque de réalité virtuelle qui permettent de vivre les courses “de l’intérieur”, en se plaçant à la place du jockey, via la réalité virtuelle. Il est même possible de changer de monture lors de la course mais la position de chaque cheval virtuel reste rigoureusement celle occupée par le concurrent sur la piste.

Céline Blache, chef de projet au PMU, explique pourquoi la filière a souhaité créer une application aussi innovante : « Il fallait moderniser l’image des courses et il nous a semblé que le tracking pouvait fortement y contribuer. Notre idée est d’attirer les Millenials, une population actuellement assez éloignée des hippodromes et de nos disciplines sportives. En allant vers des espaces qui sont les leurs, comme la 3D, la réalité virtuelle, nous pensons attirer à nouveau cette population. »

Très spectaculaire, cette application qui transforme la course hippique en jeu vidéo devrait rapprocher les jeunes de la course hippique. L’ensemble des données glanées en temps réel pour alimenter ces applications va aussi intéresser les passionnés de courses hippiques qui vont ainsi disposer de données temps réel lors des événements. Entraîneurs, professionnels et turfistes peuvent aussi exploiter ces données pour suivre le comportement de chaque cheval en réalité virtuelle, que ce soit en direct ou en replay et ainsi mieux préparer la prochaine course. Après un premier prototype monté avec une startup et qui n’a pas abouti, un appel d’offres est lancé début 2016, soumis tant à des entreprises spécialisées dans le tracking qu’auprès de grands intégrateurs IT.

56 entreprises au départ de l’appel d’offres

« Nous avons envoyé notre appel d’offres à 56 sociétés, sachant que nous avons exprimé assez précisément quel était notre besoin, mais sans donner trop de contraintes vis-à-vis de la solution à apporter et en laissant la porte ouverte aux solutions qui n’existaient pas encore sur étagère. » A l’issue de la confrontation des offres, 4 propositions sont retenues et 3 ont donné lieu à une phase pilote sur les hippodromes de Vincennes et de Deauville. C’est à l’issue de ces évaluations que la proposition conjointe de Mac-Lloyd, une startup spécialisée dans le tracking sportif, et de Thales est finalement retenue.

Mac-Lloyd fournit le capteur qui est adapté sur la plaque de trot fixée sur le sulky pour le trot attelé. Pour le trot monté et le galop, l’intégration est en cours avec un capteur qui sera fixé sur le tapis de selle. Une des contraintes fortes de ce projet réside dans la précision qu’il est nécessaire d’obtenir dans la localisation de chaque cheval en course. Une précision GPS classique, de l’ordre de 1 à 2 mètres, est notoirement insuffisante pour suivre une course de chevaux en réalité virtuelle. « Nous avions deux exigences sur ce plan, précise Céline Blache. Nous souhaitions atteindre une précision de géolocalisation inférieure à 25 cm mais certains de nos sites comme Chantilly étant classés au patrimoine historique, il n’est pas possible d’installer des infrastructures lourdes. Il fallait donc privilégier des solutions techniques légères, ce qui poussait les offres vers des solutions couplant GPS et RTK. » Cette technologie met en œuvre une antenne GPS géo-référencée, ce qui permet de calculer l’écart de mesure entre sa position exacte et la position calculée par les satellites, augmentant de manière significative la précision du GPS classique. Le projet initial prévoit d’équiper en fixe les 14 hippodromes les plus importants en France afin de couvrir l’exhaustivité des Quinté+ et des courses premium nationales. Une solution mobile est aussi prévue afin de déployer la solution sur les 70 autres hippodromes français. Actuellement, le déploiement est effectif sur 4 hippodromes français.

Des données exploitées en local, et dans le Cloud

Le capteur posé sur la plaque du sulky, qui doit pouvoir fonctionner toute une journée de course pèse actuellement 150 g, un poids jugé excessif par les galopeurs mais imposé par l’usage de la technologie RTK et son antenne plus imposante qu’une simple puce GPS. Dans l’architecture informatique imaginée par Mac Lloyd et Thales, ce capteur transmet 10 fois par seconde sa position, sa vitesse et son orientation à un serveur situé sur l’hippodrome. Chaque cheval est équipé d’un capteur et ce serveur va collecter ces données et réaliser les premiers calculs simples : il va calculer la vitesse moyenne de chaque concurrent, les distances parcourues, effectuer une projection des positions à la corde, etc. Ces informations sont directement exploitées sur les écrans de l’hippodrome, mais aussi mises à disposition des diffuseurs de l’événement (Equidia, LCI, TF1) qui peuvent les insérer dans l’habillage des flux TV. Toutefois, l’exploitation de ces données ne s’arrête pas là. « Ces données sont collectées en local puis sont envoyées ensuite dans le Cloud Thales où elles sont stockées afin d’être mises à disposition des utilisateurs. Actuellement, un seul usager exploite véritablement cette mine d’informations, c’est l’application mobile. »

Disponible sur iOS et Android, l’application EpiqE Tracking permet de vivre en temps réel l’événement en réalité virtuelle ou bien de repasser la course en différé en choisissant de se placer dans la peau du jockey de son choix. Pour atteindre une performance temps réel, les données sont transmises vers le Cloud Thales via fibre optique au moyen de la solution d’échange de données Apache Kafka et viennent alimenter la plateforme Big Data PunchPlatform de Thales. Maintenue par le français, cette plateforme s’appuie sur plusieurs briques Open Source clés, dont Kafka pour l’alimentation en données, Storm pour les traitements temps réel, Spark pour l’analytique in-memory et encore Elasticsearch, Kibana, Grafana et Ceph.

Cette plateforme est testée depuis plus d’un an, mais l’application n’a été rendue disponible auprès du grand public que le 28 janvier 2018, une semaine avant le Grand Prix d’Amérique. Depuis, une course par jour bénéficie du tracking et une vingtaine de courses ont été retransmises en réalité virtuelle et sont maintenant disponibles via l’application. Mis à part quelques rares pannes de batteries, le système s’est avéré fiable et offre une précision inférieure à 5 cm, bien meilleure que celle imposée par le cahier des charges.

Tout est prévu pour séduire les amateurs lors de l’inauguration officielle d’EpiqETracking le 29 avril à Longchamp.

 


La plateforme Big Data de Thales,
taillée pour le temps réel

La plateforme Cloud mise en place par Thales dans le cadre du projet EpiqE Tracker vient capter la donnée sur le serveur local afin de la centraliser. Cette donnée est complétée par les informations relatives au contexte des courses, avec le programme des courses de la journée et les données de chaque partant envoyées sur le serveur à J-2 de l’événement. Dès lors, l’information est à disposition des applications mobiles des amateurs qui souhaitent vivre la course en 3D en direct et en replay. Demain, cette donnée sera mise à disposition des professionnels du monde hippique qui voudront analyser les données de la course ou éventuellement une startup qui souhaitera monter un service innovant exploitant ces données.

Lors de la course, la donnée est transmise au rythme de 10 mesures par seconde à la plateforme Thales qui est hébergée dans un datacenter Thales sécurisé, localisé en région parisienne. Les messages contenant les données sont transmis via un bus Apache Kafka et si le serveur localisé sur l’hippodrome reste une machine classique, une liaison à fibre optique avec le datacenter Thales est nécessaire afin de limiter au maximum la latence et permettre aux utilisateurs de suivre la course en direct. Thales met notamment en œuvre la brique Storm de sa plateforme Big Data afin de réaliser le traitement des streams de données en temps réel.