Dans un contexte de crise, d’entreprise distribuée et de travail hybride, les ordinateurs portables deviennent les terminaux de la résilience et l’enjeu d’une lutte tenace entre les différents protagonistes.
Le déclin du marché des ordinateurs portables au profit des smartphones semblait inéluctable, mais la crise est passée par là et mis la mobilité et la résilience au cœur des préoccupations des entreprises. Le numérique a alors franchi les dernières étapes pour atteindre le statut de technologie incontournable pour la continuité de l’activité. D’après une étude menée par Canalys, « le marché des PC a terminé l’année 2021 en fanfare, puisque les livraisons du quatrième trimestre ont dépassé les 90 millions pour la deuxième année consécutive ».
Les dernières données de Canalys montrent que les expéditions mondiales d’ordinateurs de bureau, de PC portables et de stations de travail ont tiré vers le haut le total des expéditions pour l’ensemble de l’année 2021 à 341 millions d’unités. Le marché progresse de 15 % par rapport à l’année dernière, de 27 % de plus qu’en 2019 et affiche le plus grand total d’expéditions depuis 2012. Cette hausse de la demande s’accompagne également d’une hausse des revenus. La valeur globale des expéditions du quatrième trimestre 2021 est estimée à 70 milliards de dollars US, soit une augmentation annuelle de 11 % par rapport au quatrième trimestre 2020. Pour l’ensemble de l’année, le chiffre d’affaires a dépassé 250 milliards de dollars en 2021 contre 220 milliards de dollars en 2020, soit une hausse de 15 %.
Apple M1 secoue l’écosystème
Dans un contexte marqué par la disruption des chaines d’approvisionnement, de pénurie de composants, d’augmentation des prix des matières premières et d’interventionnisme de l’Etat dans un marché désormais identifié comme vital, les fabricants d’ordinateurs portables doivent naviguer dans un environnement de plus en plus compliqué. La compétition est également exacerbée par la concurrence entre les grands acteurs.
Le premier coup de tonnerre est venu d’Apple avec l’annonce de sa rupture avec Intel et la sortie de son SoC M1 en novembre 2020. Jouant à plein son rôle de disrupteur, Apple s’appuie désormais sur les processeurs Arm et une architecture de mémoire unifiée qui accroît les performances et l’efficacité énergétique pour concurrencer les modèles x86.
Les premiers résultats du lancement de M1 ont été un succès. Selon des chiffres publiés par Reuters, ces puces ont contribué à accroitre les ventes de Mac de 32 % pour atteindre 26 milliards de dollars au cours des neuf premiers mois de l’exercice 2021 d’Apple. Avec l’annonce des successeurs du M1, les modèles M1 Pro et M1 Max, les analystes estiment que les concurrents d’Apple vont devoir mettre les bouchées doubles pour rester dans la course à la performance.
La matérialisation du Concept Luna permettrait, selon les estimations, de réduire l’empreinte carbone globale du produit de 50 %. La taille de la carte mère a été ici réduite de 75 % et le nombre de composants de 20 %. © Dell
AMD revient de loin
C’est ensuite AMD qui a annoncé le rachat de Xilinx, le premier fabricant mondial de circuits programmables FPGA et de Soc. Après plus de deux ans de tractations, AMD, qui a vu son CA bondir de 68 % en 2021, vient de recevoir l’approbation des autorités de la concurrence pour conclure le rachat. Il entend ainsi offrir un portefeuille complet de technologies de processeurs, combinant des processeurs de calcul, des processeurs graphiques (GPU), des FPGA, des circuits (SoC) pour servir les marchés des plateformes informatiques pour le Cloud, l’Edge computing et les terminaux.
Enfin, c’est Nvidia qui a mobilisé les autorités de régulation dans son feuilleton pour le rachat d’Arm. L’annonce a sonné comme un véritable coup de tonnerre dans le landerneau. La transaction la plus importante dans les semiconducteurs (60 Md$) a soulevé les craintes unanimes des régulateurs des trois principaux marchés mondiaux (Chine, États-Unis et Europe). Mais après plus de deux ans de négociation, Nvidia a fini par abandonner le rachat.
« Les ordinateurs portables devront fournir beaucoup plus de capacités de calcul, de connectivité et de sécurité. »
Des plateformes puissantes pour l’ère de la data
Quelles que soient les évolutions à venir, il est certain que les ordinateurs portables devront fournir beaucoup plus de capacités de calcul, de connectivité et de sécurité. Avec l’arrivée des nouvelles applications basées sur l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique, celles basées sur les différentes réalités (virtuelle, augmentée, étendue…), la 3D avec l’avènement des métavers et du Web3, ainsi que les applications gourmandes comme la Blockchain et la cryptographie à la volée, les ordinateurs portables devront supporter des charges de plus en plus lourdes, tout en proposant une fluidité persistante des échanges avec le réseau.
Pour ce faire, AMD et Intel ont annoncé leurs nouvelles générations de processeurs pour ordinateurs portables. Tandis qu’Intel passe à la 12ème génération, AMD commercialise la génération de cœurs Zen 3, ainsi que la nouvelle architecture AMD RDNA 2 basée sur des puces graphiques intégrées. Les deux concepteurs insistent sur l’optimisation des performances par watt, ainsi que les améliorations de la consommation.
AMD passe la quatrième…
Les nouveaux processeurs Zen3+, Ryzen 6000 Series, sont fabriqués selon le processus à 6 nm de TSMC. Pour mieux traiter les charges 3D, ces puces offrent des niveaux de performances graphiques intégrées plus élevées que la génération précédente, avec la possibilité d’afficher des jeux AAA 1080p. Ce sont les processeurs AMD Ryzen les plus véloces à ce jour, avec des fréquences d’horloge allant jusqu’à 5 GHz, des vitesses de traitement jusqu’à 1,3 fois plus rapides et des graphismes jusqu’à 2,1 fois plus rapides que ceux de la série 50003.
AMD a profité de cette annonce pour présenter en avant-première le nouveau processeur de la série Ryzen 7000 alimenté par l’architecture Zen 4 et utilisant le nouveau socket AMD AM5. Les premiers ordinateurs portables équipés de processeurs AMD Ryzen 6000 Series sont arrivés chez principaux partenaires OEM, tels qu’Asus, Dell et HP, en février.
… tandis qu’Intel parie sur une architecture hybride
De son côté, Intel pousse la douzième génération de son architecture Core. Au CES 2022 et fidèle à sa stratégie d’hypersegmentation, le fondeur a annoncé 28 nouveaux modèles Core de 12e génération, avec le lancement des nouveaux processeurs mobiles de la série H et dont le fleuron est l’Intel Core i9-12900HK. Construit sur le nouveau processus Intel 7, la 12e génération repose sur les dernières technologies, comme la prise en charge de la mémoire DDR5, la connectivité Thunderbolt 4 et le Wi-Fi 6 et 6E.
Selon Intel, les processeurs mobiles de cette génération sont jusqu’à 40 % plus rapides que les processeurs mobiles de la génération précédente. Ils sont architecturés pour répondre aux diverses charges, en associant des processeurs de performance (P-cores) et des processeurs efficaces (E-cores) à une répartition intelligente de la priorité et de la gestion des charges de travail grâce à Intel Thread Director. Intégré directement dans le noyau, Thread Director est un répartiteur de charge permettant au système d’exploitation de placer le bon thread sur le bon noyau au bon moment.
Des équipements écolo-compatibles à défaut d’être durables
Parmi les caractéristiques souhaitables que doivent proposer les PC portables, la performance et l’ergonomie ne sont plus les critères dominants. La sobriété énergétique et une conception durable sont venues parachever la liste des qualités désirables. Hélas, le mouvement n’en est qu’à ses débuts et le mieux-disant écologique se traduit souvent par l’utilisation de matériaux recyclés (les plastiques principalement) et d’emballages recyclables.
Des efforts sont consentis pour minimiser la consommation, mais ils se traduisent le plus souvent par des mécanismes d’extinction de certains composants lorsqu’ils ne sont pas utilisés. Les véritables avancées viendront des batteries. Lors du dernier CES de Las Vegas, AMD a annoncé que les ordinateurs portables basés sur ses nouvelles puces de la famille Ryzen 6000 proposeront 24 heures d’autonomie.
Cybersécurité, la menace est endémique
Dans un ordinateur, la première ligne de défense se situe au démarrage de la machine, à la frontière entre les pilotes des composants et le système d’exploitation. C’est pour cette raison que Microsoft a introduit des prérequis matériels pour la sortie de Windows 11. Chez AMD et Intel, la cybersécurité se concrétise par l’intégration de mécanismes enfouis, comme TPM, le module de chiffrement intégré. L’année 2022 devrait voir les premiers modèles incorporant la puce Pluton développée par Microsoft.
La puce qui sécurise les informations secrètes
La puce permet de sécuriser les informations secrètes, comme les mots de passe, dans un coffre-fort sécurisé.
Selon Microsoft, la puce Pluton permettrait de contrer toutes sortes d’attaques sur le matériel et d’empêcher le vol de clés secrètes utilisées en cryptographie. D’un point de vue architectural, la puce Pluton serait intégrée comme un sous-système sécurisé sur le système SoC. Il ajoute une couche de protection supplémentaire aux mécanismes intégrés par Intel et AMD.
