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Démat : les bonnes pratiques

À l’heure où les flux d’information et de données à traiter s’accroissent, la dématérialisation documentaire n’est pas une mécanique sans faille, et le moindre grippage peut avoir des répercussions désastreuses. Entre maîtrise de coûts et création de valeur, Solutions IT se penche sur les méthodes qui permettent de mener à bien les projets.

 

La numérisation des processus documentaires, aucune entreprise n’y échappe. Les enjeux sont multiples. Les plus visibles : les économies, la productivité et la rationalisation, promis par les nombreux acteurs de l’écosystème de la digitalisation. Les moins identifiables au premier abord mais tout aussi importants : l’optimisation des processus organisationnels, la compétitivité et la satisfaction des clients. La dématérialisation des documents n’est qu’un cap à franchir, le premier estiment la plupart des experts, pour s’attaquer ensuite aux métiers de l’entreprise et gagner en efficacité, en intelligence. Pour beaucoup, l’exploitation de la BI ou Business Intelligence devrait être l’objectif ultime de toute organisation. Les grandes entreprises ont été longtemps les seules à pouvoir se servir d’outils d’analyse et à réaliser du datamining, les autres s’en remettant au tableur. Mais face à la quantité de données produites quotidiennement, le périmètre de couverture de ces solutions s’est élargi, les technologies se sont standardisées, les offres des éditeurs se sont enrichies, de telle sorte que toutes les typologies d’entreprise peuvent aujourd’hui capturer, compiler et analyser les informations brutes issues de leurs activités pour prendre les décisions concurrentielles qui s’imposent dans leur secteur. Encore faut-il disposer de données pertinentes et d’informations à jour, les rendre exploitables, pouvoir les retrouver au moment voulu et les conserver en toute sécurité dans le temps. Articulation essentielle dans cette approche générale, la chaîne de la dématérialisation documentaire vise à fournir en carburant toutes les bases de données de l’entreprise et libérer le fameux capital informationnel. La réussite d’un projet de dématérialisation n’a donc pas seulement des vertus économiques et environnementales, elle conditionne tout simplement l’avenir à court et moyen terme des organisations.

Le périmètre est variable, et lié aux référentiels

Tous les actifs documentaires ont vocation à être pris charge, mais mieux vaut se focaliser sur les plus stratégiques. Ainsi la plupart des spécialistes s’accordent-ils sur la nécessité d’identifier les processus qui permettent de dégager un retour sur investissement le plus rapide possible et ceux qui sont soumis à une contrainte règlementaire. Les processus qui impactent les coûts tels que les factures fournisseurs ou les documents RH, ceux qui conditionnent le revenu comme les commandes clients ou les contrats, et ceux relevant d’une indispensable traçabilité sont à considérer en priorité. Les solutions d’automatisation du P2P (purchase to pay) sont une illustration de cette approche coûts/revenus/valeur probante : les attentes d’une mutualisation de la fonction finance sont similaires à celles sous-tendues par la mise en place d’une solution de dématérialisation : accélérer les délais, réduire les coûts de traitement, gagner en fiabilité et tracer les données. Ici, le P2P s’inscrit dans une gestion globale des ressources nécessaires au fonctionnement d’une entreprise, avec pour point central le traitement de la facture. Les contours du projet sont donc larges. Autre exemple de champ d’application vaste, le courrier entrant. Là, il s’agit de limiter les manipulations de documents en capturant tous les flux à la source, puis d’automatiser le tri et l’extraction de données afin d’accélérer la distribution du courrier vers les bons interlocuteurs mais aussi d’extraire automatiquement le maximum de données contenues dans les documents. La mise en œuvre de ces deux exemples est fortement soumise aux activités de l’entreprise. Celle-ci pourrait se contenter de dématérialiser uniquement ses factures, de numériser seulement certains types de courrier, de ne s’en remettre qu’aux outils de sa messagerie électronique, et, ainsi, dématérialiser par à-coups. Seulement, l’information nécessaire à l’activité de l’entreprise augmente régulièrement.

« Les méthodes itératives donnent de bons résultats, même s’il est parfois nécessaire pour certaines entreprises, habituées au cycle en V, d’opérer une transition méthodologique et organisationnelle pour être en mesure de poursuivre leur transformation numérique. »

Xavier Morcillo, Amexio

Elle est de plus en plus structurée et emprunte des canaux de plus en plus nombreux. La vitesse à laquelle cette croissance s’opère excède la vitesse de transformation des processus de l’entreprise, si bien que des silos d’informations se constituent très facilement. Dans ces conditions, au-delà du triptyque évoqué plus haut, comment déterminer la typologie des documents à traiter en priorité ? Comment nourrir efficacement une GED avec l’ambition de redistribuer l’information partout dans l’entreprise ? “L’information et la manière de l’exploiter sont conditionnées par des facteurs endogènes (usages, processus métier, stratégie d’entreprise) et exogènes (technologies, réglementation) à l’environnement de l’entreprise dont les intérêts et la vitesse de mutation sont fortement divergents. Dresser dans ces conditions une liste de documents à adresser en priorité à une GED est ardu. Il est dans tous les cas important de s’appuyer sur les référentiels de l’entreprise. D’abord celui des informations critiques qui liste l’ensemble des ressources informationnelles sans lesquelles l’activité de l’entreprise serait compromise de manière durable et/ou catastrophique. Ce type de référentiel est généralement détenu par les risk managers. Il y a ensuite le référentiel des contenus métier qui décrit les typologies de documents utilisés et dresse également la liste des métadonnées qui leur sont associées, des publics cibles et des fréquences d’utilisation. Enfin, le référentiel d’exigences réglementaires a pour objectif d’identifier l’ensemble des documents que l’entreprise est juridiquement tenue de conserver, en raison de leur valeur probatoire ou patrimoniale. Ceux-ci n’ont toutefois pas vocation à être préservés dans une GED, mais dans un SAE. Il ne faut pas hésiter à mener un bref audit destiné à fournir à l’entreprise un instantané de ses différents gisements informationnels et à en cartographier les processus les supportant. Ce diagnostic doit offrir aux décideurs une vision à 360° des différents canaux empruntés par les flux d’informations et des composantes du SI avec lesquelles la GED entretient des interactions : solution de gestion des inputs (chaîne de dématérialisation), des outputs (chaîne éditique), MPS, application métier, dispositifs multicanal, etc.”, détaille Xavier Morcillo, CEO d’Amexio.

Eviter les approches big-bang

Marie-Ange-Monnard_Sollan« Le piège classique pour une entreprise est de vouloir être trop ambitieuse tout de suite. Il faut échelonner son projet dans le temps et anticiper. »

Marie-Ange Monnard, Sollan

Cette photographie de l’organisation en place vient renforcer un audit initial classique, préalable essentiel à la mise en place de tout nouveau projet. “On ne dématérialise pas tout dans l’entreprise de la même manière ni selon les mêmes processus. Il faut procéder pas à pas en tenant compte à la fois des contraintes du papier et des processus métier. Chaque métier peut avoir des processus différents et des contraintes différentes influant sur la priorisation à donner à la dématérialisation. Il peut s’agir par exemple de contraintes règlementaires en matière d’archivage, ou liées à la nature du document à dématérialiser ou encore dépendantes de la différence de SI d’un métier à l’autre”, estime pour sa part Marie-Ange Monnard, consultante senior dématérialisation chez Sollan. La dématérialisation est destinée à modifier en profondeur les fonctionnements de l’entreprise, mais gare aux mauvais pas dans les approches. “Le changement c’est quelque chose de primordial. Mais passer d’une organisation classique au tout numérique n’est pas systématiquement une bonne chose, en tout cas,

Aline Saponara
Aline Saponara

l’approche big-bang n’est pas souhaitable. L’expérience montre que bien des projets mis en place trop rapidement se sont révélés mal ou sous utilisés, et ont été purement et simplement abandonnés lorsqu’est arrivée la sentence du ROI”, souligne Aline Saponara, directeur des ventes chez Kodak Alaris.

Revoir les processus pour mieux les adapter au numérique

Au cœur des projets, les applications métier et leurs processus documentaires sont nécessairement impactés par la digitalisation en dépit de finalités diverses. Leur transformation ou leur adaptation est un point à ne pas négliger. Dans bien des cas, les processus sont modifiés avant le déploiement de la dématérialisation. “Il n’est jamais très bon de calquer une solution sur un processus existant. La mise en place d’une solution est justement l’occasion de remettre en question le processus. Cela n’est pas toujours possible mais, quand ça l’est, il faut le faire. Adapter le processus, repenser le processus pour la dématérialisation est souvent une démarche gagnante”, indique Pascal Lavest, consultant manager ECM chez Atos. En outre, pour mener à bien une analyse de processus, il faut d’abord avoir mis en place une gouvernance de l’information, autrement dit un cadre délimité par la politique de gestion des documents d’activité et des archives dans une entreprise.

Pascal-Lavest_Atos«Il faut toujours garder à l’esprit que la machine est faillible, notamment dans le traitement du document où il y a toujours un risque de substitution de caractères. »

Pascal Lavest, Atos

“D’une façon générale, mieux vaut éviter que le processus métier s’adapte aux outils numériques. Pour garantir le succès d’un projet, il ne faut pas reproduire à tout prix numériquement ce que l’on faisait avec le papier. Il faut en profiter pour réorganiser, nettoyer les processus tout en renforçant la sécurité afin d’éviter les dérives potentielles liées à l’usage du numérique, par exemple à travers un circuit de validation. Modifier un processus, c’est aussi changer l’activité des différents collaborateurs dans l’entreprise. La conduite de changement se fait alors en plusieurs temps, il faut communiquer en amont, former et accompagner, surtout les populations sensibles. Cette conduite de changement s’applique aussi aux relations que l’entreprise développe avec ses partenaires externes”, souligne aussi Marie-Ange Monnard. Concrètement, comment se construit un processus documentaire ?

Lister l’ensemble des actions

La méthodologie se résume par un procédé global : d’abord lister l’ensemble des actions à réaliser par les acteurs concernés par un processus. Recenser ensuite pour chaque action les obligations de conservation de preuve, et préciser parallèlement les exigences réglementaires et contractuelles ainsi que le type de contrôle auxquels sont soumis les documents. Enfin, à chaque action doit correspondre, dans les SI ou dans les dossiers papier, des types de documents ou des enregistrements qui constituent contenu et preuves. L’opération doit permettre dans le même temps de déterminer si un document donné est un support original, nativement papier ou nativement numérique, et se traduit finalement par la création d’une base de données, d’un tableau de gestion dynamique indexé par processus, action et type de document.

Le piège des logiques commerciales

Une fois ces canevas stratégiques en place, se pose rapidement le choix d’une solution, à acheter bien sûr, mais aussi à louer ou désormais à exploiter dans le cloud. Prisée par les petites et moyennes structures, cette dernière possibilité ne laisse cependant pas toujours la latitude nécessaire pour reproduire en finesse l’organisation de l’entreprise. Le SaaS repose en effet sur la mutualisation qui par définition établit des dénominateurs communs entre tous les utilisateurs pour proposer des fonctionnalités couvrant des besoins généraux. La personnalisation n’est pas non plus toujours le propre des solutions on premise, qui demandent parfois, elles aussi, de coller à leur standard. “Tous les éditeurs possèdent toutes les solutions, factures fournisseurs, documents entrants, formulaires, etc. mais dans ce marché, chacun possède sa spécialité, et une erreur consiste à choisir sa solution chez un éditeur pour lequel cette solution est marginale. En outre, si le projet est modeste, mieux vaut opter pour une solution agile, et pour un plus grand projet, une solution de type progiciel. Mais surtout, la difficulté du choix réside dans le fait que les prestataires sont souvent assignés à un éditeur. Il est donc difficile d’avoir de leur part un avis objectif sur la pertinence de telle ou telle offre. Il faut parvenir dans la mesure du possible à comprendre l’écosystème de ces prestataires : travaillent-ils avec la même solution ou ont-ils réalisé différents projets avec différentes solutions ? Il faut rester vigilant car personne n’échappe à la logique commerciale”, souligne Pascal Lavest. La typologie de l’entreprise influe sur un projet et par conséquent sur les solutions à mettre en œuvre. D’autant que celles-ci ne sont pas à considérer sous le seul angle de la réduction des coûts, martèlent les experts. L’entreprise a tout à gagner à élargir son champ de vision sur des offres permettant d’actionner les leviers du digital dans toutes ses activités, de faciliter la dématérialisation de bout en bout et de servir la gouvernance documentaire.

« Les entreprises sous-estiment la complexité d’un projet de RAD-LAD et oublient souvent de communiquer la totalité de leur fonds documentaire. »

Kévin Clément, Spigraph

Reprise de l’existant, cycle de vie, type de document…

Kevin Clément
Kévin Clément

La reprise de l’existant n’est pas systématique, essentiellement pour une raison de coût. “Il se peut que lors d’un déménagement par exemple, une entreprise ait besoin de numériser son fonds documentaire, de reprendre tout ou partie de ses archives, mais en règle générale, c’est au moment d’aller chercher un document papier dont on a besoin qu’on le numérise et qu’on le fait alors entrer dans le processus de dématérialisation”, explique Kévin Clément, marketing manager South EMEA chez Spigraph.

… et réversibilité

“La reprise est très rare, par exemple pour les factures. En revanche certains documents sont concernés, notamment les contrats, les mandats de prélèvement, les documents RH. Cette reprise éventuelle est liée au cycle de vie du document et au type de documents”, confirme Marie-Ange Monnard. De fait, la notion de cycle de vie du document est un autre élément structurant des projets. De nombreuses entreprises ne considèrent pas la face organique du document : il naît, vit et meurt, trois états qui déterminent les procédures de stockage et d’archivage. Lorsque les spécialistes parlent de documents d’activité ou de records, d’archives courantes, intermédiaires ou définitives, non seulement ils pointent la nécessité d’ordonner l’information pour les besoins opérationnels, de bâtir les stratégies d’accès aux données, de produire et de préserver des preuves en cas de litige, mais ils permettent d’éliminer tout simplement les documents lorsque l’entreprise n’en a plus besoin… L’arrêt de la conservation du document en fonction de sa durée de vie est une source d’économie et d’efficacité.

Si les enjeux de l’archivage sont essentiels, ceux de la récupération des données le sont tout autant. La réversibilité, la capacité à extraire les données et les documents d’activité d’un système source en place vers un système cible, est une notion à prendre en compte dans toutes les solutions. Car la vie de l’entreprise rend inévitable dans le temps le changement d’un ou plusieurs composants de son architecture logicielle dédiée à la gestion documentaire. Ces évolutions, qui peuvent survenir à tout moment, entraînent des risques qu’il faut prévenir en anticipant et en organisant les modifications intervenant dans l’équilibre des systèmes documentaires. Préparer la réversibilité des documents d’activité revient à se prémunir d’éventuelles pertes de données précieuses. Cette réversibilité, véritable PRA documentaire, tient compte du document lui-même et de ses métadonnées, de la charge informationnelle permettant de garantir son authenticité et son intégrité, et des traces d’activité et des droits d’accès le concernant.