Accueil De la GED à la Digital Workplace, une mue nécessaire

De la GED à la Digital Workplace, une mue nécessaire

Plus ouverte aux applications métier, plus collaborative, la gestion électronique de documents, ou GED, s’adapte aux tendances du marché. Mais elle ne peut rivaliser avec la Digital Workplace, espace de travail numérique dont elle n’est qu’un élément et qui cristallise les nouveaux modes d’organisation.

 

 

La transformation du poste de travail a connu peu d’avancées depuis l’adoption du PC au bureau. Matériel et logiciels ont évolué en termes de puissance et d’ergonomie mais, fondamentalement, entre l’assignation des tâches et le travail d’équipe, l’organisation des activités autour de l’IT n’a pas été marquée par de grands bouleversements. La crise sanitaire a perturbé cet équilibre du travail au bureau en tant que norme et instauré progressivement un mode de travail hybride bâti sur la présence et la distance des salariés. Les entreprises ont alors cherché à adapter leur management en généralisant l’usage d’outils numériques exploités par une minorité de télétravailleurs, mais elles ont très vite éprouvé les limites de ces outils conçus pour des situations d’exception et ajustés au cas par cas par la DSI. Dans de nombreuses organisations, la gestion du document se voit encore confiée aux suites bureautiques. Plus évoluée, la GED ne connaît pas une telle adoption, malgré une indéniable percée sur le marché.

Le rôle de la Digital Workplace

Or si ces deux types de solutions revendiquent des capacités d’échanges et de collaboration autour du document, elles se prêtent difficilement à une transposition de l’espace de travail traditionnel vers un bureau virtuel, un rôle assigné aujourd’hui à la Digital Workplace.

> Sylvain Chatagnon

« Une Digital Workplace est un environnement numérique partagé où chaque collaborateur accède au quotidien et selon ses droits aux informations, aux connaissances, aux applications et aux personnes pour que tout le monde soit en mesure de travailler ensemble efficacement. La GED ne remplit pas ce rôle, encore moins à distance. Il faut pouvoir collaborer au-delà du document, notamment en ajoutant une dimension sociale à la gestion documentaire, par exemple en utilisant les votes et les commentaires qui permettent de mettre en avant les différents auteurs du document. Il ne s’agit pas de créer une GED supplémentaire, mais de créer un lien entre les différents outils déjà en place et les compléter. S’intégrer par exemple dans les suites Microsoft Office 365 ou Google mais aussi s’intégrer dans des GED métiers, verticalisées. L’objectif est de permettre à l’utilisateur d’accéder à un document et d’agir sur celui-ci, quel que soit le repository de provenance de ce document. La solution est également là pour simplifier le travail de l’utilisateur parce que le monde de la GED est quelquefois un peu compliqué : la Digital Workplace facilite la convergence et la multiplication des usages, communication, collaboration, processus métiers et gestion des connaissances, sans pour autant les complexifier », explique Sylvain Chatagnon, consultant chez Jalios.

Le smartphone, la Digital Workplace la plus utilisée

« Une GED et une Digital Workplace n’ont rien à voir. La première gère mes documents électroniques, la seconde centralise toutes les applications auxquelles j’ai accès en un seul et même espace. La GED n’est qu’un accès parmi d’autres proposés au sein de la Digital Workplace. Alors que nous utilisons de plus en plus d’outils numériques, et souvent en doublon, par exemple des GED métiers et Office 365, qui est une forme de GED, il y a une nécessité de centraliser l’accès à ces outils. Quand je me connecte sur ma Digital Workplace, je suis reconnu et j’ai accès à mes outils. La Digital Workplace que l’on connaît le mieux est le smartphone, c’est une digital Workplace personnelle », souligne pour sa part Matthieu Lluis, co-fondateur, direction projet chez Jamespot.

Matthieu Lluis

Cocréation et coédition, partage de documents entre membres d’une même équipe, annotations, notifications et gestion de versions figurent parmi les principales fonctions d’une GED, mais pour gérer avec fluidité l’alternance entre le travail au bureau, à la maison ou en déplacement, la solution n’est pas la mieux placée, d’autant qu’elle ne traite pas tout type de données. « Le document se décloisonne, circule et doit être disponible pour ceux qu’il intéresse, ce qui a pour conséquence l’explosion du volume des données échangées, traitées et restituées en interne ou en externe puis conservées au sein d’une organisation. C’est le fameux flux entrant, circulant et sortant. Cette notion de décloisonnement des données et des documents a fait naître des besoins de gestion de masse de données qui n’est ni plus ni moins que le Big Data. Si on ajoute à ces points le fait que le collaborateur doit être considéré comme un client de sa propre entreprise et qu’il faut lui fournir une solution dotée d’une bonne ergonomie, on est dans la notion d’UX, et sur ce plan, la GED est aujourd’hui limitée et rigide », argumente Romain Le Formal, responsable marketing solutions digitales chez Tessi.

Optimiser le parcours de la donnée

A l’ère de l’instantanéité, l’emplacement des données devient secondaire, la Digital Workplace fédérant les accès aux ressources nécessaires aux activités du groupe ou de l’individu. L’intérêt de cet espace de travail numérique repose aussi sur sa flexibilité, qui assure à chaque salarié, où qu’il soit, de retrouver son environnement de travail et de reprendre sa tâche là où il l’avait arrêtée. Souvent associée au terme de flex office, la Digital Workplace est constituée d’un ensemble d’outils. Mais pas question ici d’interconnecter simplement des solutions, qu’il s’agisse de messagerie, de système de visioconférence ou de chat, de GED, d’outils de reporting ou de gestion projet, d’un intranet ou d’un extranet. C’est le principe de plateforme qui prévaut, avec un ensemble d’applications développées ou non par un même éditeur et offrant une panoplie de services que l’entreprise articule selon ses besoins. Ainsi, si la GED excelle dans la gestion de workflows documentaires, elle n’est pas conçue pour le case management, autrement dit la gestion des dossiers qui incluent à fois les contenus, les processus et la collaboration associés à un client ou un projet. La Digital Workplace s’inscrit, elle, dans un parcours optimisé de la donnée. Il n’est donc pas étonnant de trouver parmi ses principaux critères de choix de solides capacités de traitement multicanal des données entrantes. L’orchestration de la distribution de ces données vers chaque utilisateur est un autre critère important. « On cherche à automatiser le plus possible de façon à faciliter la tâche de chaque collaborateur au moment où il est opportun pour lui d’intervenir. Dans le cas d’un case management, par exemple, l’objectif est d’accélérer et de fluidifier l’instruction du dossier avec une bonne expérience du collaborateur, qui, souvent, n’a pas envie de multiplier les outils, aller successivement dans le CRM, dans la compta ou dans un ERP pour réaliser son travail. Avoir une expérience satisfaisante depuis la même interface est une vertu de la Digital Workplace », indique Romain Le Formal.

Une gestion fine des droits d’accès

Autre point important, le respect de la conformité autour du traitement documentaire et de la donnée, de la signature électronique à l’archivage, dans un contexte où la majorité des applications logicielles s’exploitent désormais en mode SaaS. Le volet sécurité est également essentiel. « Sécuriser une Digital Workplace, c’est sécuriser les données au niveau de l’accès aux infrastructures. Nous facilitons la mise en place de droits d’accès à la fois aux contenus, aux applications et aux workflows de validation. Mais pour le collaborateur, moins il doit s’authentifier, meilleure est son expérience », souligne Sylvain Chatagnon. Le recours à un service SSO est souvent retenu par la DSI pour optimiser l’authentification des salariés, en cohérence avec la mise en place du projet transverse que constitue la Digital Workplace. « L’un des intérêts de la Digital Workplace est de clarifier la liste des outils disponibles et utilisés, puis de les centraliser en un endroit. Pour la DSI, c’est une façon de rationaliser les usages et de canaliser le shadow IT, en proposant une suite cohérente d’outils. Pour autant, est-ce qu’une suite d’outils fait une entreprise ? Non. Une entreprise, ce sont des valeurs, un esprit, des métiers, des personnes. L’enjeu, au moment où tout le monde travaille de son côté, et de recréer un esprit d’équipe. Dans cette boîte à outils qu’est la Digital Workplace, cela passe par un usage revisité du bon vieil intranet des années 2000 », estime Matthieu Lluis.