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Société(s) numérique(s) : évoluer ou mourir

Voici une tribune Libre de Claude Molly-Mitton, président de l’USF, l’association des utilisateurs francophones des solutions SAP.

Après le Big Data en 2012 et l’Innovation en 2013, la société numérique sera le fil rouge de l’année 2014 pour l’USF. De l’internet des objets, qui se comptera en centaines de milliards d’ici quelques années, à l’impression 3D en passant par les nano technologies, notre société moderne est au coeur d’une véritable « révolution numérique », qui se caractérise par l’introduction massive de la technologie dans tous les aspects de la vie quotidienne. Le numérique n’est plus aujourd’hui affaire de spécialistes, mais il imprègne chacun de nous et à chaque instant, sans forcément qu’on en ait toujours bien conscience.

Bienvenue dans l’ère de l’« homo numericus »

Nous entrons dans l’ère de l’« homo numericus », une ère de renouveau et d’espoir, qui concrétise l’accès à la connaissance pour tous, mais engendre dans le même temps son lot de dérives et de peurs, comme à chaque révolution technologique, et de nouveaux enjeux éthiques. Pour comprendre l’ampleur de celle-ci, il faut s’intéresser au triptyque « usages – maîtrise des risques – conséquences sociétales ». Cela est particulièrement bien illustré par l’exemple de l’impression 3D, qui est en quelque sorte à elle seule une « révolution dans la révolution numérique ». Cette technologie a pourtant des bases assez anciennes, mais ses progrès récents lui promettent un essor majeur dans les prochaines années, avec des domaines d’applications si variés qu’ils pourraient bien totalement bouleverser de nombreux secteurs et usages : prothèses médicales, organes artificiels, conquête spatiale, construction de maisons préfabriquées, et plus largement toute la chaine de production industrielle avec l’impression de pièces détachées. Quant aux risques, ils sont à la fois liés aux objets que la technologie permet désormais aisément de créer (des armes notamment) mais aussi à la propriété intellectuelle, qui risque de faire connaître aux industriels les mêmes problématiques que celles de la musique, du livre ou du cinéma avec la copie numérique. Du côté des conséquences sociétales, certains envisagent très sérieusement que nous pourrions, grâce à l’impression 3D, relocaliser une partie de notre production industrielle, ce qui n’entrainerait d’ailleurs pas forcément la relocalisation dans le même temps des emplois.

Le DSI, un « homo numericus » comme les autres ?

Cette (r)évolution du numérique impacte tout autant LA Société que les sociétés, et c’est bien là tout l’enjeu pour les directions des systèmes d’information (DSI), de savoir recréer de la valeur autour de leur rôle dans l’organisation, dans ce nouveau contexte du « tout digital ».

Car à l’heure de la société numérique, la DSI n’est plus le point central de la maîtrise technologique et est prise en étau entre des salariés de la génération digitale disposant et maîtrisant des outils numériques personnels plus performants que ceux de l’entreprise, et les directions métiers, parfois tentées par mettre en place sans la DSI des applications en mode cloud séduisantes.

La DSI doit aussi concilier le maintien en conditions opérationnelles d’applications anciennes, dont certaines peuvent encore parfois dater des années 70, d’ERPs (Progiciels de Gestion Intégrés) des années 80 à aujourd’hui, et d’applications cloud accessibles en mobilité récemment déployées. Pas simple !

L’ERP entre disparition et renaissance

Dans ce contexte, il est important de s’interroger sur l’avenir des ERPs, qui sont au coeur des systèmes d’information de nos organisations, au sein de la société numérique. Cette question se pose en fait sous deux angles bien distincts : l’intégration des ERPs actuels et des ERPs « post modernes » à travers des solutions hybrides (pour reprendre l’expression du cabinet Gartner) au sein de nos systèmes d’information complexes ; et l’avenir des éditeurs de ces logiciels, qui voient leur modèle économique totalement bouleversé. Ces éditeurs sont en effet face à un double challenge, qu’ils ont parfaitement appréhendé : réussir le virage technologique du cloud, tout en réinventant un modèle économique à la fois viable pour eux et acceptable pour les clients. Difficulté supplémentaire, ils doivent dans le même temps gérer la transition de l’ancien modèle vers le nouveau, auprès de clients qui prendront souvent des années voire des dizaines d’années avant d’y venir. En d’autres termes, ils doivent réussir un virage à 180 degrés, à la fois sur le plan technologique et économique, et réussir en même temps à maintenir le client au coeur de leurs préoccupations. La tentation peut alors être grande de vouloir « profiter » le plus longtemps et le plus possible de la « rente » sur laquelle ces éditeurs sont encore assis pour quelques années, à travers les modèles de licences et de maintenance annuelle, qui font que l’on rachète l’ERP à son éditeur tous les 4 à 5 ans sans qu’il ait forcément beaucoup évolué.

Les éditeurs d’ERPs doivent toutefois comprendre que cette rente, qui leur procure des marges très confortables, est déjà à son maximum acceptable par les clients, et qu’ils feraient une grave erreur en voulant l’augmenter encore (par exemple en augmentant les taux de maintenance), et compromettraient leur avenir en risquant ni plus ni moins à termes de perdre leurs clients.

La société numérique peut être vue par certains comme un risque. Mais c’est surtout un formidable gisement d’opportunités pour nos organisations et pour notre Société. Face à ce nouvel environnement, les organisations, clients comme fournisseurs de solutions, n’ont qu’un choix d’avenir : évoluer ou mourir.