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Osez l’IA : une stratégie ambitieuse mais encore loin du terrain

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Le 1er juillet, le gouvernement a lancé le plan national « Osez l’IA », destiné à accélérer l’adoption de l’intelligence artificielle dans toutes les entreprises françaises d’ici 2030. Derrière cette ambition affichée, les acteurs du terrain, comme Digitalent, appellent à plus de pragmatisme.

Une vision globale et volontariste

Avec « Osez l’IA », l’État vise des objectifs chiffrés clairs : atteindre 100 % d’adoption de l’IA dans les grands groupes, 80 % dans les PME et ETI, et 50 % dans les TPE d’ici 2030. Un défi de taille, alors qu’à ce jour, seules 13 % des PME et ETI françaises ont entamé cette transition.

Pour y parvenir, le plan s’articule autour de trois axes majeurs :

  • La sensibilisation par le biais d’un réseau de 300 ambassadeurs IA, des rencontres mensuelles en région, un événement national (AI Business Day), et une consultation citoyenne actuellement en ligne sur Make.org.
  • La formation, avec une Académie de l’IA attendue fin 2025, proposant contenus pédagogiques gratuits et mobilisation du programme Compétences et Métiers d’Avenir.
  • L’accompagnement, avec des Diagnostics Data IA cofinancés à 40 %, un catalogue de cas d’usage, et des prêts garantis pour soutenir les projets structurants.

Des intentions louables, mais des décalages persistants

Sur le papier, les mesures semblent structurantes. Mais Christelle Courant, directrice du développement chez Digitalent, invite à nuancer : « On observe une adoption à deux vitesses. Les grandes entreprises avancent, mais du côté des PME et ETI, il y a encore beaucoup d’hésitations. Elles n’ont pas toujours les ressources pour se lancer, ni les équipes spécialisées pour les accompagner. »

Si l’IA générative a généré un fort emballement médiatique, la réalité du terrain est plus contrastée. Beaucoup d’entreprises peinent à transposer les usages découverts dans un cadre personnel à leur contexte professionnel : « La marge d’erreur est plus tolérable dans le grand public. En entreprise, une mauvaise décision peut avoir un impact sur la productivité ou la compétitivité. Et il y a aussi des enjeux majeurs de souveraineté, de sécurité des données, surtout face à des solutions souvent américaines ou asiatiques. »

Revenir aux fondamentaux métiers

Plutôt que de pousser la technologie pour elle-même, Christelle Courant milite pour une approche centrée sur les besoins métiers :

« Il faut arrêter de mettre la techno avant l’identification des problèmes. Ce que demandent les entreprises, c’est d’abord : qu’est-ce qui me bloque aujourd’hui ? Où puis-je gagner en performance ? Et seulement, ensuite, on regarde quelles solutions peuvent répondre à ça. »

Cette vision, partagée dans les accompagnements menés par Digitalent, repose sur un diagnostic initial, des interviews d’usagers, et des tests concrets : « Ce n’est qu’en manipulant l’IA dans son propre quotidien qu’on comprend vraiment ce qu’elle peut, ou ne peut pas faire. L’imaginaire se libère au fur et à mesure des essais concrets. »

Former, oui, mais aussi encadrer

La future Académie de l’IA représente un levier structurant, mais encore faudra-t-il la compléter par un accompagnement humain de proximité : « Former, c’est bien. Mais il faut aussi des experts, des interlocuteurs capables de faire le lien entre les solutions technologiques et les réalités métiers de chaque entreprise. »

Christelle Courant insiste aussi sur la diversité des IA disponibles.

« On réduit souvent l’IA à l’IA générative, mais ce n’est qu’un pan. D’autres modèles, plus frugaux ou plus spécialisés, peuvent être plus adaptés aux besoins réels des PME. »

Un plan ambitieux qui devra s’ancrer dans la réalité

Le plan « Osez l’IA » affiche des ambitions fortes, soutenues par des dispositifs structurants et des financements ciblés. Mais sa réussite passera aussi par sa capacité à répondre aux vrais besoins des entreprises, à ne pas survaloriser la seule IA générative, et à accompagner les professionnels dans leur quotidien. Reste également à voir ce que ce plan sur l’IA prévoit sur le volet écologique dans sa quête d’éduquer les entreprises et si les syndicats représentant les salariés seront finalement aussi pris en compte dans l’équation, puisqu’ils ne figurent pas dans la liste des partenaires, contrairement aux organisations patronale.