Selon l’organisation professionnelle, le marché du numérique en France devrait atteindre cette année les 65 milliards d’euros, en hausse de 6,3 %. Une croissance soutenue par l’adoption du Cloud et les impératifs de cybersécurité. Semble ombre au tableau : la pénurie de compétences.
Bonne nouvelle pour Véronique Torner. Pour sa première conférence semestrielle, la toute nouvelle présidente de Numeum a pu confirmer la bonne santé de l’écosystème numérique française. L’organisation professionnelle qui réunit les ESN, les éditeurs, les plateformes cloud et les sociétés d’ingénierie et de conseil en technologies (ICT) relève à la hausse ses prévisions pour 2023.
Le taux de croissance devrait s’établir non plus à 5,9 % mais à 6,3 %. Sur cette base, le chiffres d’affaires réalisé par les acteurs du numérique en France atteindra cette année les 65 milliards d’euros, un nouveau record. Au niveau européen, la France se place en troisième position derrière l’Espagne (+6,9 %) et le Royaume-Uni (+6,8 %) mais devance l’Allemagne (+6 %) et les Pays-Bas (+5,2 %).
Avec ce chiffre, certes en baisse par rapport à 2022 (7,5 %) – une année exceptionnelle -, mais équivalent à 2021, le secteur montre sa capacité de résilience en dépit de la guerre en Ukraine, de la crise énergétique, du contexte inflationniste ou de la pénurie de composants.
Tous les métiers représentés par Numeum profitent de cette dynamique même si les éditeurs et les plateformes cloud surperforment avec une croissance estimée à 9,4 % contre 4,2 % pour les ESN et 5,9 % pour le conseil en technologies en 2023 (ICT). De fait, la croissance du secteur numérique est largement portée par le Cloud (+21,2 %) et son adoption progressive dans un grand nombre d’organisations.
Budget IT en hausse
Les autres leviers traditionnels sont également à l’œuvre comme la data et l’intelligence artificielle, l’Internet des objets (IoT) avec l’essor de la 5G et l’edge computing, la cybersécurité ou, plus généralement, la transformation digitale qui recouvre l’expérience client, l’e-commerce, la dématérialisation ou la digitalisation des process.
Le budget dédié au numérique ne semble pas avoir été affecté par les crises à répétition. Selon l’enquête réalisée par le cabinet d’études PAC pour Numeum auprès de cent DSI, plus de la moitié d’entre eux (51 %) déclarent un budget IT en hausse pour 2023.
Sans surprise, les DSI interrogés placent la sécurité du système d’information (64 %) en tête de leurs priorités devant l’amélioration de l’expérience client (58 %) et l’analyse des données (51 %). L’étude de PAC relève également une forte augmentation de l’importance accordée par les DSI aux outils mis en place pour encadrer le télétravail, à la migration vers le Cloud et à l’optimisation des processus internes de l’entreprise.
Le numérique responsable, nouvelle priorité des DSI
Enfin, transition énergétique oblige, le numérique responsable devient plus que jamais un critère essentiel. 58 % des DSI ont déjà mis en place des actions pour réduire l’empreinte carbone de leur SI et 11 % ont prévu de le faire cette année. Dans le même temps, ils sont 87 % à prévoir d’intensifier ces actions en 2023.
Cela tombe bien, le numérique responsable est aussi le fer de lance de Véronique Torner. Membre du comex du groupe Smile, elle est à l’initiative de Planet Tech’Care, plateforme qui met en relation des entreprises souhaitant s’engager pour réduire l’empreinte environnementale du numérique avec un réseau d’experts.
Selon l’enquête de PAC, 58 % des entreprises du numérique ont déjà mis en œuvre des actions spécifiques en faveur d’un numérique responsable et 74 % répondent déjà à au moins un appel d’offres comportant des critères RSE.
85 000 offres d’emploi non pourvues
La seule ombre qui pourrait ternir ce beau tableau porte une fois encore sur le déficit de compétences. En 2022, le secteur du numérique est créateur d’emplois pour la troisième année consécutive avec 47 000 emplois créés. Une création nette d’emploi sur six en France a été réalisée par les acteurs du numérique l’an dernier. Pour autant, la profession pourrait embaucher plus encore. Selon une étude de l’Institut Montaigne, citée par Numeum, 85 000 offres d’emploi sur les métiers “cœur” du numérique sont actuellement non pourvues.
« Si cette pénurie de talents n’est pas nouvelle elle s’intensifie à l’heure où la transformation numérique est à l’agenda de toutes les entreprises, déplore Numeum. Les compétences dans le domaine de la donnée, de la sécurité, du développement ou encore du Cloud sont les plus recherchées. »
Une guerre des talents sans merci
La raréfaction des talents est encore accentué par la volonté de 59 % des DSI de réinternaliser certaines compétences clés dans la sécurité, le Cloud ou la production IT. Dans ce marché de l’emploi sous tension, ils sont même 86 % à davantage débaucher des profils issus de leurs prestataires de services numériques (ESN, ICT…).
Pour attirer et fidéliser leurs collaborateurs, ces prestataires font feu de tout bois en proposant de nouveaux modes de travail tels que le télétravail, en renforçant leurs programmes de formations et d’évolutions de carrière et en capitalisant sur le bien-être au travail. De fait, les acteurs de la tech dominent les classements des entreprises où il fait bon travailler, de type Great Place to Work.
Xavier Biseul