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 « Nous devenons en plus un opérateur cloud et de services gérés », Nicolas Aubé, président de Celeste

En 2022, l’opérateur Télécoms a ajouté une corde à son arc : la reprise d’Oceanet Technology enrichit désormais son réseau de fibre optique de services gérés autour de l’hébergement et de la sécurisation d’actifs et de données numériques. Son président, Nicolas Aubé, aborde l’année en cours avec confiance malgré quelques sources de stress pour ses équipes : les difficultés à obtenir des approvisionnements réguliers en équipements et à recruter des compétences. Le contexte économique, moins dynamique, ne devrait pas freiner la demande en solutions de sécurité des entreprises et acteurs publics.

 

Solutions-Numériques : Garderez-vous un bon souvenir de 2022 ?

Nicolas Aubé : Ce fut une troisième année de forte croissance, marquée par l’acquisition d’Oceanet Technology qui nous permet de structurer notre offre avec de l’hébergement, des services en MSP et de la cybersécurité. Nous étions un opérateur Télécoms propriétaire de son réseau de fibre optique, nous devenons en plus un opérateur cloud et de services gérés avec une offre complète d’infrastructures pour des clients privés et publics. Nous poursuivrons son intégration sous notre marque. Ce qui se traduira par notre premier changement de positionnement en vingt ans, d’opérateur Télécoms à gestionnaire d’infrastructures de bout en bout, dans un environnement complètement sécurisé avec nos propres infrastructures.

« Un changement de positionnement, d’opérateur Télécoms à gestionnaire d’infrastructures de bout en bout, dans un environnement complètement sécurisé. »

Les pénuries d’équipements vous ont-elles affecté ?

Oui, comme toute l’industrie. Celeste doit composer avec des délais très longs pour recevoir des équipements ou des composants. Cela n’a pas vraiment d’impact au quotidien pour les clients finaux parce que nous avons mené de gros investissements pour déployer notre fibre, nos équipements, dont de très grosses capacités d’interconnexion de plus de cent gigabits.

Et celles de compétences ?

C’est toujours un peu une bataille pour obtenir les meilleurs. Il y a un déficit global de compétences numériques en France, qu’il s’agisse d’ingénieurs ou de techniciens. Notre dernière acquisition nous permet de compter plus de 700 personnes en France.

Ces pénuries ont-elles créé des contentieux ? Avez-vous subi des annulations de commandes ou été  contraints de verser des pénalités ?

Non, nous avons respecté nos engagements parce que nous pouvons déployer de manière autonome notre propre réseau de fibre. Celeste a aussi proposé du matériel reconditionné afin de raccourcir les délais de livraison. Toutefois, certains projets spécifiques ont imposé un allongement des délais. Nous n’avons pas payé de pénalités parce que pendant le Covid nous avons pu mener à bien le déploiement de notre fibre sur 130 kilomètres entre Lyon et Grenoble puis Genève. Nous avions dû engager des négociations avec des clients pour décaler des dates de livraisons. Mais nous n’avons rien connu de tel en 2022.

Le marché est-il plus attentiste ?

Pas vraiment. Nous devrions finir l’année 2022 avec une croissance de 3 à 5 %. Notre carnet de commandes reste solide. Les demandes pour des équipements et services ne fléchissent pas. L’arrêt des lignes en cuivre va soutenir le marché de la fibre. On anticipe cette évolution. Il faut aussi sécuriser les réseaux et l’accès aux ressources numériques, ce qui nécessite de passer à une logique SaaS, et donc beaucoup d’investissements. Notre activité demeure soutenue par tous ces projets. 

« L’arrêt des lignes en cuivre va soutenir le marché de la fibre. »

Quels seront vos moteurs de croissance ?

Dans notre cœur de métier, seulement la moitié des entreprises en France sont fibrées, alors que le cuivre devra être retiré d’ici 2029. Les organisations doivent également sécuriser leurs réseaux, pour leur filtrage du web et de leurs applis, contrôler leurs accès au web. Quand un simple pare-feu suffisait, il faut aujourd’hui des UTM qui apportent une connaissance plus fine et un contrôle plus évolué de leurs accès. Du côté de l’hébergement, on note plus de PME employant des logiciels en SaaS pour leurs messageries, leurs outils métiers. Ces logiciels migrent vers un hébergement extérieur, pour plus de sécurité et une réponse active en cas de sinistre, pour lancer un plan de secours depuis un second site.

Et pour le channel ?

Tout le secteur est mobilisé pour accompagner les entreprises dans leur révolution numérique. Le channel évolue d’un modèle transactionnel vers la fourniture d’un catalogue de services d’accompagnement. Beaucoup de nos partenaires s’orientent dans cette voie car l’industrie numérique manque de compétences. Nous proposons nos solutions à d’autres opérateurs, intégrateurs et ESN de sécurité de proximité. Pour eux, notre fibre représente une solution intéressante, car souveraine puisque nous sommes propriétaires de notre réseau. Ils sont sûrs d’obtenir un interlocuteur proche des besoins de leurs clients, à qui ils proposent notre portefeuille de téléphonie et l’accès à notre plateforme cloud VMware et ses services managés, localisée en France avec trois datacenters dans trois villes différentes.

« Le channel évolue vers la fourniture d’un catalogue de services d’accompagnement. Beaucoup de nos partenaires s’orientent dans cette voie. »

Quelles sont vos perspectives pour 2023 ?

2023 sera l’An 1 de la sécurité informatique. Les entreprises vont prendre des mesures simples pour se prémunir des cyberattaques. Nous leur proposons des infrastructures et un hébergement fiables pour sécuriser leur réseau local, le cloisonner et empêcher, à l’entrée comme à la sortie, toute fuite de données et toute intrusion, sécuriser leurs applicatifs avec une authentification à double facteurs, sans oublier un centre de sécurité. Nos prestations passent aussi par des campagnes de prévention auprès des utilisateurs, des mises à jour permanentes des sites et des logiciels.

« 2023 sera l’An 1 de la sécurité informatique. »

Les modes de facturation évoluent-ils ?

On observe une progression de la facturation par abonnement, pour les SaaS et la cybersécurité, surtout pour les mises à jour contre les nouveaux virus. Les entreprises ne sont pas très à l’aise avec la facturation à l’usage, hormis pour des pics d’activités saisonniers. De notre côté, nous proposons deux modes de facturation pour nos datacenters, selon la consommation d’électricité ou à l’usage.

La souveraineté devient-elle une priorité pour vos clients ? 

Les entreprises comprennent qu’elles ne peuvent dépendre de l’étranger pour leurs datas. De plus en plus de nos clients en France et en Suisse souhaitent localiser dans leur pays non seulement leurs données mais aussi leurs compétences. Notre nationalité française entre de plus en plus en compte même pour des clients des Gafam. Cette volonté de relocaliser le numérique, ses infrastructures et ses talents en France est un axe majeur du marché en 2023.

« Cette volonté de relocaliser le numérique, ses infrastructures et ses talents en France est un axe majeur du marché en 2023. »

Et l’ISR (investissement socialement responsable)?

Il devient une composante très imposante de leurs demandes, surtout chez les acteurs publics. Les collectivités locales poussent au reconditionnement, même pour des équipements de réseau. Tout comme les clients scrutent aussi la question énergétique des datacenters. Sur ce point, Celeste est en pointe depuis plus de dix ans grâce à la récupération de l’air ambiant pour refroidir les serveurs, ce qui réduit la facture et leur empreinte carbone.

Le datacenter Marilyn, installé à Marne-la-Vallée, opérationnel depuis 2012, se caractérise par sa construction verticale, fonctionnant en « free-cooling » total avec l’utilisation de l’air extérieur pour rafraîchir les salles serveur.

 

Vincent Bussière