« Il n’ y a pas aujourd’hui de vrai programme de reconversion massif au numérique, ce qui est pourtant essentiel pour pouvoir former aux nouveaux métiers », explique à Solutions Numériques Soumia Malinbaum, présidente de la commission Emploi–Formation et administratrice de Numeum.
A quelques mois de la présidentielle, l’organisation professionnelle Numeum a dévoilé vingt actions majeures, articulées autour de quatre priorités (voir encadré en fin d’article). La première est de mettre l’accent sur la formation aux métiers du futur et le renforcement des compétences numériques dans tous les secteurs économiques. Une priorité qui implique d’agir en matière de formation initiale, professionnelle et surtout en matière de reconversion, phénomène d’ampleur auquel, selon Numeum, notre système de formation professionnelle, n’est pas préparé en dépit de quelques aménagements depuis 2017.
« Il n’ y a pas aujourd’hui de vrai programme de reconversion massif au numérique, ce qui est pourtant essentiel pour pouvoir former aux nouveaux métiers », affirme Soumia Malinbaum, présidente de la commission Emploi–Formation et administratrice de Numeum. Les dispositifs existants sont, selon Numeum, quelque peu déconnectés les uns des autres et manquent de moyens financiers suffisants.
Faire passer à l’échelle le dispositif Transitions Collectives
La première action en matière de formation consiste donc à booster la reconversion professionnelle entre secteurs d’activité, en collaboration avec les branches professionnelles et leurs OPCO, afin d’anticiper les mutations technologiques. Cela en faisant passer à l’échelle le dispositif Transitions Collectives (TransCo), resté confidentiel depuis son lancement en 2021. « Inspiré du dispositif Numéric’Actif de Numeum, il a pour objet de reconvertir des salariés de secteurs d’activité décroissants vers des métiers porteurs, explique Soumia Malinbaum. Du fait des ruptures technologiques, le sujet de la reconversion est d’une extrême importance. Et si l’initiative est encore peu connue, c’est notamment parce qu’il n’existe pas de plate-forme permettant aux entreprises de savoir facilement quels sont les salariés en cours de formation, afin de les sourcer et de les intégrer dans un processus de recrutement », poursuit-elle.
Déployer certains programmes au niveau national
La deuxième action va être de faire passer à l’échelle, et sur tout le territoire, plusieurs programmes de formation au numérique particulièrement inclusifs comme P-Tech, piloté par le ministère de l’Education Nationale, et Numéric’Emploi.
« P-Tech permet d’accompagner des jeunes en bac professionnel (ndlr : notamment le bac pro Systèmes Numériques pour ce qui concerne le secteur du digital), depuis la seconde professionnelle jusqu’à la deuxième année de BTS en complétant le programme académique par des contenus apportés par le monde professionnel, explique Neila Hamadache, déléguée à l’emploi et à la formation chez Numeum. Des entreprises du secteur du numérique, mais aussi de secteurs clients du numérique travaillent ensemble et suivent une même classe pendant cinq ans. Des professionnels viennent faire des interventions lors des cours sur toutes les innovations technologiques qui arrivent sur le marché et n’ont pas encore été intégrées dans les programmes scolaires comme l’intelligence artificielle, la cybersécurité, les objets connectés ».
L’objectif est de rapprocher les jeunes du monde de l’entreprise. « Ces professionnels proposent aussi des heures de mentorat et les jeunes peuvent travailler sur des projets amenés par les entreprises, afin de s’exercer sur des thèmes très concrets, déclare la déléguée. Les entreprises peuvent aussi proposer des stages. L’objectif est que ces jeunes arrivent en post-bac et en première et deuxième année de BTS avec un niveau de compétences plus élevé que les jeunes n’ayant pas bénéficié de cet apport complémentaire ». Le programme a été mis en place dans neuf lycées dans l’Hexagone et l’objectif est de le déployer dans un maximum d’académies.
Extension de Numéric’Emploi à tout le territoire d’ici deux ans
Quant au dispositif de reconversion et d’évolution professionnelle Numeric’Emploi, qui fédère les acteurs régionaux pour soutenir le développement des compétences des demandeurs d’emploi, il va être déployé en Occitanie ce mois-ci et dans toutes les régions d’ci à deux ans. « Si son extension à d’autres régions que le Grand Est a pris un peu de temps, c’est notamment lié à la manière dont nous souhaitions le mettre en place, explique Soumia Malinbaum. Il fallait faire parler entre eux l’ensemble des parties prenantes et des interlocuteurs que sont les organisations professionnelles, les représentants des régions et les représentants de Pôle emploi ».
La troisième action soutenue par Numeum vise à développer les formations au numérique en alternance pour tous types de publics, pour se rapprocher du niveau de l’Allemagne où plus de 60 % des jeunes scolarisés d’une classe d’âge sont alternants. Cela grâce au versement d’une prime exceptionnelle aux TPE/PME afin de leur permettre d’accueillir des apprentis formés au numérique et à un soutien financier aux initiatives de formation à l’étranger pour les apprentis, à l’image d’Erasmus +.
Enfin, la quatrième action consiste à favoriser la diversification des talents dans les métiers du numérique en donnant davantage de moyens à la Grande Ecole du Numérique, en lançant une campagne de communication nationale sur les enjeux de la diversité dans les métiers du numérique et en accueillant des stagiaires de troisième dans les entreprises du numérique, avec un objectif de 50 % de jeunes filles.
Numeum, qui a envoyé l’ensemble de ses propositions aux candidats à l’élection présidentielle, fait partie du collectif Convergences Numériques, qui regroupe onze associations. Il organise le mercredi 9 mars prochain au Cirque d’Hiver Bouglione le Pitch des candidats à l’élection présidentielle.
Les quatre priorités de Numeum pour le numérique
1 Mettre l’accent sur la formation aux métiers du futur et sur le renforcement des compétences numériques dans tous les secteurs économiques.
2 Gagner en autonomie stratégique en inscrivant la France dans la course aux technologies de rupture avec notamment la création d’un grand pôle ministériel technologique regroupant le numérique, l’industrie, l’enseignement supérieur et la recherche
3 Booster la lutte pour la cybersécurité et contre la cybercriminalité
4 Faire du numérique le levier majeur de la décarbonation, de la biodiversité et de la protection des ressources rares
Patricia Dreidemy
