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Booster les compétences dans le secteur de l’ingénierie

Avec l’avènement de l’industrie 4.0, la plupart des systèmes ou produits sont intégrés à des logiciels et communiquent entre eux. Une nouvelle approche du travail, qui implique de comprendre, en tant qu’ingénieurs, comment travailler avec des logiciels dans un environnement hautement connecté. Sashi Jayachandran, responsable Europe des services d’ingénierie chez Infosys, livre son expertise sur le sujet aux lecteurs d’Emplois Numériques.

Au sein de l’Union européenne, c’est devenu un sujet brûlant : trouver des talents s’avère être une tâche bien complexe. Des problématiques spécifiques – telles qu’une population vieillissante, un manque de compétences pour accélérer la transition numérique et un énorme écart entre les sexes – ont contraint la Commission européenne à promouvoir des projets et des stratégies susceptibles d’améliorer le niveau de compétences. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a pourtant annoncé que 2023 serait l’« Année européenne des compétences ». Des technologies telles que l’intelligence artificielle et le cloud computing sont à la pointe des efforts de numérisation. Néanmoins, selon Eurostat, seuls 54 % des Européens possèdent des compétences numériques basiques. Il existe donc une énorme marge d’amélioration.
Mais pourquoi le talent d’ingénieur pur ne suffit-il pas ? Revenons en quelques années en arrière. L’ingénierie a subi un changement radical par rapport à la façon dont elle était perçue il y a 20 à 25 ans. Prenez n’importe quelle industrie qui nécessite des ingénieurs : la santé, l’aviation, l’automobile ou l’industrie. Avec l’avènement de l’industrie 4.0, la plupart des systèmes ou produits sont intégrés à des logiciels et communiquent entre eux. Cela signifie que les ingénieurs doivent savoir comment travailler avec des logiciels dans un environnement hautement connecté.  Je vous livre ici quelques pistes de réflexion pour comprendre comment stimuler les compétences dans le secteur de l’ingénierie.

Améliorer ses compétences numériques tout au long de la vie

Dans une entreprise, les compétences numériques ne sont plus seulement un domaine dédié aux ingénieurs spécialisés dans le logiciel. La technologie utilisée dans une industrie est très souvent développée dans une autre industrie. Par exemple, dans une voiture, des fonctionnalités telles que les applications connectées, l’intégration avec un smartphone et la connectivité à domicile sont des technologies développées en dehors des attributions du constructeur automobile. Les compétences de base en ingénierie doivent être complétées par la capacité de développer des logiciels ou du code. Il faut donc adopter un état d’esprit d’apprentissage tout au long de la vie. Les collaborations entre l’ingénierie de base et le personnel informatique peuvent également contribuer à l’apprentissage entre pairs. Les entreprises peuvent proposer des modules de formation et des programmes de mentorat aux ingénieurs pour qu’ils acquièrent davantage de compétences logicielles. Avec les plates-formes low code/no code, les experts du domaine peuvent également acquérir des compétences logicielles sans avoir à passer des années à étudier un langage de programmation. Par exemple, en Allemagne, 36 poids lourds industriels, dont Bosch, Siemens et Continental, se sont associés pour s’appuyer sur les compétences d’une multitude de collaborateurs, dans des domaines tels que les logiciels et la logistique afin de combler le déficit de compétences. C’est devenu essentiel. Car notre pays passe de l’ère industrielle à l’ère numérique.

La collaboration industrie-université

La collaboration entre l’industrie et le milieu universitaire représente un moyen sûr de rendre les talents universitaires pérennes et précieux pour le marché européen. Les industries pourraient financer des subventions de recherche et aider à développer des laboratoires au sein des universités qui peuvent donner aux étudiants un avant-goût de projets réels. Les stages en entreprises sont également un autre moyen de sensibiliser les étudiants. Alternativement, les spécialistes en informatique peuvent travailler avec des étudiants en ingénierie sur des parties du cycle de vie du développement de nouveaux produits. Cette approche peut combler le fossé entre les compétences en ingénierie et en logiciel.

Le rôle de l’automatisation et de l’intelligence artificielle

Au cours des derniers mois, l’IA a autant fasciné qu’elle a inquiété, notamment avec l’avènement de l’IA générative. L’IA et l’automatisation joueront un rôle déterminant dans le travail. Aujourd’hui, c’est on ne peut plus clair : il faut utiliser l’IA à notre avantage. Composer un message, pour obtenir un résultat d’un outil d’IA générative, reste un effort créatif qui sera réalisé avant tout par l’Humain, alors qu’une grande partie de l’optimisation viendra de l’IA.

Promouvoir la diversité et l’inclusion

Le secteur de l’ingénierie doit non seulement embarquer plus de femmes ingénieures, mais aussi recruter dans un large éventail de milieux socio-économiques, culturels, éducatifs et sociaux. Car c’est bel et bien cette approche qui augmentera l’innovation par rapport à une configuration d’équipe peu diversifiée. Les personnes issues de milieux non scientifiques, par exemple, peuvent apporter de nouvelles idées ou une nouvelle approche de la conception d’un produit. Le partenariat avec des organismes communautaires peut d’ailleurs offrir un vivier de talents diversifiés.

L’importance des objectifs ESG

Aujourd’hui, concevoir un produit ne consiste pas seulement à répondre à un besoin, mais aussi à garder un œil sur son impact environnemental. Il doit avoir une empreinte carbone minimale, inclure une ingénierie verte et être compatible avec l’économie circulaire. Il y a quelques années, ces aspects n’étaient pas intégrés dans les cursus d’ingénierie. Aujourd’hui, de nombreuses universités européennes proposent des cours multidisciplinaires qui couvrent ces aspects. La collaboration entre les différentes parties prenantes, les talents et les équipes au sein d’une entreprise est essentielle pour développer les compétences dans le secteur de l’ingénierie. L’équipe informatique doit travailler en étroite collaboration avec les équipes d’ingénierie pour identifier les lacunes en matière de compétences et les combler soit en recyclant le personnel existant, soit en recrutant latéralement.

Outre les compétences numériques axées sur les logiciels, il faut insuffler un nouvel élan pour développer des compétences non techniques telles que la résolution de problèmes, la communication et le travail d’équipe. L’Europe dispose d’institutions solides qui s’adaptent à la réalité changeante du secteur de l’ingénierie. Un changement de perspective est nécessaire pour stimuler les compétences dans cette industrie.

 

Sashi Jayachandran