L’Union européenne franchit une étape décisive dans son indépendance technologique. Elle vient de lancer quatre projets majeurs pour produire des semi-conducteurs pour les puces électroniques au cœur de toutes les chaînes de valeur stratégiques.
“Il s’agit d’une étape importante dans le renforcement de la capacité de production de semi-conducteurs de l’Europe, ainsi que dans le renforcement de la résilience et de la sécurité d’approvisionnement de l’écosystème des semi-conducteurs de l’Union”, explique le communiqué de la Commission européenne.
Quatre usines de semi-conducteurs sont lancés pour la première fois avec l’installation de production intégrée (IPF) et de fonderie ouverte de l’UE (OEF). Cette initiative est éminemment stratégique pour redonner une part de souveraineté à l’Europe.
Gagner sa place face à la Chine et aux US
L’ambition est de pouvoir sécuriser les approvisionnements pour des activités vitales et critiques notamment l’IA ou l’armement, tout en captant une part de marché mondiale à hauteur de 20 % d’ici 2030. Ces projets permettent de réduire ainsi les dépendances externes pour gagner en souveraineté et en autonomie stratégique. Quarante-trois milliards d’euros d’investissements publics et privés d’ici à 2030 sont mobilisés pour cette initiative, qui vise à libérer l’UE en partie de sa dépendance vis-à-vis des principaux fournisseurs que sont la Chine et les États-Unis.
“Les installations désignées comme EEO ou CIP bénéficieront d’un soutien administratif prioritaire, leurs procédures d’autorisation seront rationalisées et leur accès aux lignes pilotes sera facilité dans le cadre de l’initiative “Semi-conducteurs pour l’Europe”. Dans le même temps, ces installations pourront être tenues d’accepter et de hiérarchiser les ordres prioritaires en cas de crise. »
Des mariages pour éviter les ruptures
Les fonderies ouvertes de l’UE sont des installations de fabrication qui consacrent au moins une partie de leur capacité à la production de puces pour des clients externes. En ouvrant leurs capacités à d’autres entreprises, elles contribuent à la résilience de la chaîne d’approvisionnement mondiale en les liant.
Les Integrated Production Facilities (IPF) sont des installations de fabrication de semi-conducteurs verticalement intégrées qui combinent plusieurs étapes de production de puces, de la conception et de la fabrication aux essais et au conditionnement.
Ces deux catégories sont au cœur de la réduction de la dépendance à l’égard des chaînes d’approvisionnement de tiers.
Quatre projets pour introduire les puces dans l’UE
Les quatre projets qui ont obtenu le statut IPF ou OEF sont réalisés par les entreprises suivantes :
– ESMC, une entreprise allemande commune entre Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (« TSMC »), Bosch, Infineon et NXP. Elle produira des puces haute performance et économes en énergie en utilisant la technologie FinFET avancée sur des plaquettes de 300 mm. La production devrait atteindre 480 000 plaquettes par an d’ici 2029.
– Ams-OSRAM, en Autriche, mettra en place une installation intégrée pour permettre la fabrication frontale de 180 nanomètres à signaux mixtes et de technologies de qualité automobile qualifiées.
– Infineon Technologies Dresden, en Allemagne, mettra en place une installation intégrée pour produire un large éventail de technologies et de produits au sein de deux familles de technologies hétérogènes : la puissance discrète et les circuits intégrés analogiques / à signaux mixtes.
– STMicroelectronics, en Italie, mettra en place une installation intégrée afin d’offrir une intégration verticale de l’ensemble des processus de production de la chaîne de valeur du carbure de silicium (le « SiC ») de 8 pouces, qui ne sont pas encore présents dans l’Union.
Bien que prometteuse, cette initiative et les montants alloués restent encore faibles au regard de la place de la puissance chinoise et américaine en la matière. Selon plusieurs experts, il faudrait multiplier les investissements par 4 ou 5 pour tenter de regagner une place dans la course technologique et de l’autonomie.