Miro dévoile son nouvel AI Innovation Workspace, une évolution majeure qui place l’intelligence artificielle au cœur du travail collaboratif. Nicolas D’André, Country Manager France pour Miro, revient sur cette nouvelle approche, la vision technologique portée par l’entreprise et les usages observés chez les clients français, de Doctolib à Accor.
SNC : Miro vient d’annoncer son AI Innovation Workspace. Que recouvre exactement cette évolution ?
Nicolas D’André : Le défi, aujourd’hui, c’est de mettre l’intelligence artificielle au service du travail d’équipe. On connaît déjà la productivité individuelle que peut apporter l’IA. Le vrai enjeu, c’est de l’intégrer dans les environnements collectifs pour que tout le monde avance plus vite, mais aussi dans la même direction.
Par exemple, dans une équipe produit qui prépare un nouveau service, il faut analyser un marché, générer des idées, faire une analyse compétitive, définir les priorités, puis livrer. Tout ça se fait dans Miro. Si chacun utilise l’IA dans son coin, on va peut-être aller plus vite, mais pas forcément ensemble.
Le but, c’est d’intégrer l’IA dans le cadre du travail d’équipe pour réduire les frictions entre équipes — produit, design, marketing — et fluidifier tout le processus.
Technologiquement, qu’est-ce que cela signifie ?
N.A. : Cela veut dire qu’on enlève les frictions entre les équipes. Par exemple, lorsqu’un brief produit est envoyé à une équipe design, les questions habituelles restent : « Quelle donnée as-tu utilisée ? Quel prompt ? ». Avec l’AI Innovation Workspace, ces étapes deviennent plus fluides. On part du document, on génère un prototype automatiquement, et visuellement, chacun peut suivre la transition entre le brief et le design de l’application. Cela accélère la collaboration.
Nous avions déjà structuré Miro depuis 2011 avec différents formats : ideation, plannings, plans d’action… L’IA vient désormais s’intégrer complètement dans le canevas. Et ce qui fait la différence, c’est que tous les éléments de travail — analyse compétitive, captures d’écran, schémas d’architecture, brief produit — deviennent le contexte. L’IA peut donc travailler naturellement, sans copier-coller ni recharger le contexte ailleurs.
Le canevas devient le « prompt » commun de l’équipe.
Quelles sont les nouvelles capacités concrètes pour les utilisateurs ?
N.A. : Si vous avez un document dans Miro, par exemple une cinquantaine de post-its, l’IA peut le résumer dans un document structuré, puis le transformer visuellement en plan projet, timeline ou prototype. On peut aussi demander à Miro de challenger un brief produit : un agent IA spécialisé va vérifier si tous les éléments nécessaires ont été pris en compte.
Chaque client peut créer ses propres agents, adaptés à son métier. Les besoins d’une banque ne sont pas les mêmes que ceux du retail.
La connexion au knowledge de l’entreprise est aussi essentielle. Le contexte est déjà dans Miro, mais on peut ajouter celui des systèmes internes — via AWS, Amazon Q ou d’autres solutions — pour enrichir encore les résultats.
Nous n’utilisons pas une seule IA pour tout faire : plusieurs modèles sont utilisés selon les besoins. Et si un client a son propre LLM, comme Accor, il peut être consommé directement dans Miro.
Comment les entreprises françaises comme Doctolib ou Accor utilisent-elles ces outils ?
N.A. : Ce sont des entreprises qui ont déjà entamé leur transformation digitale. Leur objectif est d’aller plus vite, mais en équipe. Par exemple, un chef de produit peut désormais créer lui-même des mini-prototypes. Les équipes design, souvent très sollicitées, gagnent du temps car elles reçoivent une première version déjà structurée. Il y a moins d’allers-retours, moins d’incompréhension. Chaque équipe peut donc étendre un peu son périmètre, tout en se concentrant sur son expertise.
L’IA permet aux généralistes de faire un peu plus, et aux experts de se concentrer sur les tâches à forte valeur.
Doctolib ou Accor ont besoin d’innover vite, car la compétition est forte. Miro leur permet d’aller de l’idéation à l’impact beaucoup plus rapidement, et même de créer de petits produits directement depuis le prototype.
Avez-vous observé des différences culturelles ou organisationnelles dans l’adoption de l’IA collaborative ?
N.A. : Oui. Certains pays ont une longueur d’avance sur la digitalisation. En France, on a aussi beaucoup de « digital factories » : Thales, Decathlon, Accor… Mais le vrai défi reste la multiplicité des outils. Chaque équipe a ajouté son propre outil, ce qui renforce les silos. Miro se positionne comme le squelette d’une équipe projet, depuis l’idée jusqu’au delivery, en connectant les données, les applications et les équipes.
Ce n’est pas une révolution, mais une mise en œuvre plus fluide du travail collaboratif.
Avez-vous des retours mesurables sur la productivité ou la créativité ?
N.A. : Oui. Certains clients nous disent qu’ils ont accéléré leur production de 20 à 30 %.
Quelqu’un qui utilise Miro va gagner plus de trois heures par semaine. Mais l’impact le plus fort se trouve au niveau des équipes : le projet sort plus vite, avec une meilleure qualité.
L’innovation est vitale : si l’on ne lance pas de nouveaux services, on perd des parts de marché. Miro donne un avantage compétitif en accélérant l’innovation.
Où sont traitées les données utilisées par Miro ?
N.A. : Nous travaillons avec des data centers AWS situés en Europe. Il n’y a pas d’apprentissage sur les données des clients. L’étanchéité est totale. Le client peut à tout moment activer ou désactiver l’IA, pour certaines fonctionnalités ou certaines équipes.
Nous ne stockons aucun output généré par les clients.
Quelle place accordez-vous à la transparence et à la gouvernance des modèles ?
N.A. — La transparence est essentielle pour instaurer la confiance. Nous utilisons plusieurs modèles, internes, open source ou partenaires. On ne peut pas tout faire avec un seul modèle. Chaque client valide les aspects de sécurité, et nous travaillons en continu avec eux sur ces sujets.
Comment imaginez-vous le travail collaboratif d’ici trois ans ?
N.A. : Rien n’est figé. On apprend tous les jours. Je pense que les généralistes pourront faire plus de choses : idéation, prototype, voire première version d’un produit grâce au no-code ou low-code. Les cycles d’activité vont s’accélérer. Comme dans le jeu vidéo : des équipes plus petites, mais plus nombreuses, capables de produire plus de blockbusters plus vite.
Pensez-vous que l’IA pourra co-créer, plutôt que simplement assister ?
N.A. : La frontière est mince. Avec le Miro Sidekick, on est déjà dans une forme de co-création : un agent entraîné sur le knowledge de l’entreprise, capable de proposer, challenger, générer des écrans ou un prototype. Mais le designer reste indispensable : il apporte le grain de folie, l’intuition, la touche humaine que l’IA ne peut pas générer.
Quel message souhaitez-vous adresser aux entreprises françaises qui hésitent encore à intégrer l’IA dans leur collaboration ?
N.A. : Sous réserve que la confiance soit instaurée sur les données, l’IA permet de travailler en équipe de manière plus structurée, sans rupture dans le contrat de travail.
Le travail reste un travail d’équipe. L’IA réconcilie l’innovation avec le collectif.
Cela implique du changement, plus d’agilité, mais les entreprises n’ont pas toujours le luxe d’attendre. L’IA va déléguer les tâches rébarbatives pour permettre aux équipes de se concentrer sur ce qui fait le sel de leur métier.
Si vous deviez résumer en une phrase la promesse de Miro avec l’IA ?
N.A. : Passer de l’idée à l’impact en quelques jours, et pas en quelques mois.








