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« Moderniser le mainframe, c’est se donner un avantage compétitif » Valérie Bertino (Kyndryl France)

Kyndryl, premier fournisseur mondial de services d’infrastructures informatiques, a mené au printemps une étude auprès de plus de 500 décideurs utilisateurs de mainframe dans le monde (Amérique du Nord, Europe, Asie-Pacifique et Amérique latine). Celle-ci a confirmé que loin de disparaître, le mainframe reste un pilier incontournable et se révèle même un accélérateur d’innovation à l’ère de l’IA. Valérie Bertino, Vice President Core Enterprise & zCloud, Practice General Management chez Kyndryl France revient sur les enseignements de cette enquête.

SNC : Votre étude montre que le mainframe reste un pilier des systèmes critiques. Comment expliquez-vous cette résilience, alors que certains prédisaient sa disparition ?

Valérie Bertino : Le mainframe repose sur trois piliers : fiabilité, sécurité et performance. Il a été conçu pour tourner 24/7, avec une redondance intrinsèque. C’est pourquoi il héberge les données les plus critiques. Sa sécurité native est un atout essentiel aujourd’hui. Enfin, son niveau de performance est inégalé : il peut traiter des millions d’opérations par seconde.

Plus de la moitié des entreprises intensifient leur usage du mainframe. Quelle nouvelle fonction stratégique prend-il aujourd’hui ?

V. B. : Le mainframe s’intègre de plus en plus avec le monde ouvert. Dans la banque par exemple, il est désormais relié aux applications modernes comme la consultation en ligne des comptes. Cette capacité à se connecter avec des environnements ouverts et à supporter de nouveaux développements lui donne une fonction stratégique croissante.

Près de 90 % des organisations ont intégré ou prévoient d’intégrer l’IA dans leur environnement mainframe. Quels sont les cas d’usage les plus concrets ?

V. B. : Les cas d’usage les plus cités concernent l’optimisation des performances et de l’allocation des ressources, l’amélioration de la détection de fraude et le renforcement de la sécurité via l’automatisation des tests. Ces usages démontrent la valeur ajoutée de l’IA pour sécuriser et moderniser le mainframe.

Comment le mainframe devient-il un accélérateur d’innovation à l’ère de l’IA ?

V. B. : Grâce aux nouvelles générations comme le z17 d’IBM, équipé de processeurs capables de faire tourner des modèles d’IA directement sur le mainframe. Jusqu’ici, il fallait souvent exporter les données pour les traiter. Désormais, la puissance de calcul du mainframe accélère les modèles IA sans sortie des données, ce qui change la donne.

Votre étude mentionne un ROI jusqu’à trois fois supérieur d’une année sur l’autre. Quelles sont les principales sources de gain financier ?

V. B. : Les gains proviennent d’abord de la réduction des coûts de maintenance et d’infrastructure. Par exemple, avec notre offre de mainframe mutualisé dans un cloud localisé en France, les clients passent d’un modèle Capex à un modèle Opex, en mutualisant coûts matériels et logiciels. D’autres cas incluent l’optimisation de bases de données, qui permet de réduire le stockage et les licences, ou encore la mise en place de dashboards analytiques modernes. Dans le secteur bancaire, nous voyons aussi des exemples concrets comme la détection proactive de risques budgétaires grâce à la corrélation des données et à l’IA.

Vous évoquiez la détection de fraude : pouvez-vous détailler ces cas d’usage ?

V. B. : C’est l’un des usages les plus développés. Il s’agit par exemple de détecter des incohérences dans les déclarations de sinistres, d’identifier des documents falsifiés ou de croiser différentes sources de données pour mettre en évidence des anomalies. Ces solutions permettent de réduire les risques et de mieux protéger les clients.

Votre enquête met aussi en lumière une pénurie de talents. Comment les entreprises peuvent-elles surmonter ce défi ?

V. B. : Un premier levier est le cross-skilling, c’est-à-dire former des profils IT existants, comme des développeurs applicatifs, aux environnements mainframe et infrastructures. Un deuxième levier est l’automatisation, pour réduire la dépendance aux compétences rares. Enfin, l’IA joue aussi un rôle, par exemple pour documenter automatiquement le code et faciliter la prise en main par de nouveaux talents. Dans ce contexte, 75 % des entreprises font appel à des fournisseurs externes comme Kyndryl pour accompagner leurs projets.

La conformité réglementaire influence aujourd’hui 94 % des projets de modernisation. Quels sont les secteurs les plus concernés ?

V. B. : En premier lieu la banque et l’assurance, avec DORA en Europe. Mais désormais, tous les secteurs critiques concernés par NIS2 sont impactés. Nous accompagnons nos clients avec des solutions comme le déploiement d’un troisième site, des cyber vaults pour sécuriser les données, et des projets de modernisation visant la résilience.

Comment imaginez-vous l’avenir du mainframe ?

V. B. : Il restera le pilier des environnements hybrides. Les applications critiques continueront d’y résider. Avec la possibilité d’exécuter des moteurs d’IA directement sur les processeurs mainframe, la valeur de cette plateforme va s’accroître. La croissance exponentielle des données et des traitements renforce son rôle.

Quel message souhaitez-vous adresser aux DSI encore hésitants à investir dans la modernisation de leur environnement mainframe ?

V. B. : Ce n’est pas une question de “si” mais de “quand et comment”. Le coût de modernisation a fortement baissé tandis que les bénéfices augmentent. Les cas d’usage concrets, comme la détection de fraude ou l’optimisation des données, montrent que moderniser le mainframe, c’est se donner un avantage compétitif. Il est temps de casser les silos et d’amener la valeur directement au business.