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Logiciel de reconnaissance faciale dans la police : classement sans suite du signalement de députés LFI

(AFP) – La justice a classé sans suite le signalement de députés LFI dénonçant l’utilisation par la police d’un logiciel de reconnaissance faciale, un dispositif mis en oeuvre selon eux de manière illégale par plusieurs ministres de l’Intérieur, a-t-on appris lundi de source proche du dossier.

Selon cette source, ce classement a été décidé par le procureur général près la Cour de cassation, Rémy Heitz, le 27 janvier, “faute de pouvoir imputer les faits signalés à l’un des ministres visés” par le signalement.

Le 19 novembre, le groupe La France insoumise (LFI) à l’Assemblée nationale avait annoncé avoir saisi la justice au sujet de Briefcam, un logiciel qui permet d’exploiter des images de vidéosurveillance grâce à une intelligence artificielle.

Il a été mis en œuvre de 2015 à 2023 “hors de tout cadre légal”, écrivait alors l’élu LFI Aurélien Saintoul.

Dans son courrier à la justice, il désignait les ministres de l’Intérieur Bernard Cazeneuve, Bruno Le Roux, Matthias Fekl, Christophe Castaner et Gérald Darmanin, responsables selon lui “de l’achat, du déploiement, de l’autorisation et de l’utilisation d’un logiciel de manière illégale et attentatoire aux droits fondamentaux“.

Son utilisation n’avait notamment pas été autorisée par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil), insistait le député dans son courrier auprès de Rémy Heitz, qui exerce les fonctions de ministère public à la Cour de justice de la République (CJR), et dont l’AFP avait obtenu une copie.

M. Saintoul s’appuyait notamment sur les révélations, en novembre 2023, du média d’investigation en ligne Disclose concernant l’acquisition “en secret” par la police de ce logiciel israélien.

Après ces révélations, le ministre de l’Intérieur de l’époque, Gérald Darmanin, avait demandé un rapport aux inspections générales de la police, de la gendarmerie et de l’administration.

Rendu public le 28 octobre 2024, ce document relève que le logiciel Briefcam “n’a été utilisé que dans un cadre judiciaire, en temps différé, et non en police administrative, en temps réel“. Il fait état “d’un cas unique d’utilisation, illégale, de la reconnaissance faciale, sur près de 600 exploitations du logiciel“, indiquait le ministère de l’Intérieur sur son site.

M. Saintoul estimait cette dernière affirmation “peu crédible” et que les autres usages du logiciel – à savoir une vidéosurveillance algorithmique, sans reconnaissance faciale – n’étaient de toute façon pas autorisés avant 2023.

Une loi adoptée en 2023, en prévision de la sécurisation des Jeux Olympiques de Paris-2024, a en effet autorisé à titre expérimental l’association de logiciels à des caméras de surveillance pour repérer des événements jugés suspects ou à risque – ce qui permet d’alerter en temps réel un opérateur.

Il y avait une volonté d’éteindre toute forme de contestation, de critique“, a réagi auprès de l’AFP Aurélien Saintoul, “alors qu’on n’a toujours pas les éléments qui permettent de comprendre ce qui s’est passé, alors que Briefcam n’était pas un outil légal“.

C’est parce qu’il y a une irresponsabilité politique organisée qu’on s’est tourné vers la CJR, qui organise une irresponsabilité pénale“, a-t-il jugé, estimant que “désormais, la bataille est essentiellement politique“.