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« L’idée, avant de parler cyber, c’est de parler culture générale numérique » Hadi El-Khoury, codirigeant de Lumérique

A l’occasion du FIC, Solutions Numériques & Cybersécurité a eu la chance de rencontrer Hadi El-Khoury dans la foulée de la conférence de presse de Lumérique, une nouvelle initiative pour la sensibilisation des jeunes à l’hygiène numérique.

 

SNC – Qu’est-ce que Lumérique ?

Hadi El-Khoury – Lumérique est un mouvement collectif et citoyen pour vivre un numérique éclairé. C’est le résultat de quinze ans d’expérience que nous avons en association, avec ISSA France Security Tuesday qui, grâce aux cahiers de vacances les As du web, est allé à la rencontre des jeunes en établissement scolaire et de leurs parents. Cette rencontre a fait naître un laboratoire qui nous a permis de penser à d’autres ressources pédagogiques et, surtout, nous a fait prendre conscience qu’aujourd’hui, pour avoir un impact, il faut se démultiplier.
Pour se démultiplier, il a fallu capitaliser sur ce savoir-faire et industrialiser la pédagogie, c’est-à-dire mettre en place une mallette pédagogique qui permettra à un adulte d’aller délivrer un atelier d’une heure auprès d’une classe – sachant que nous adressons les 7-17 ans. Cette mallette pédagogique a été expérimentée, testée, a fait ses preuves. Aujourd’hui, nous avons la certitude que n’importe qui, geek ou pas, retraité ou pas, loin ou proche du numérique, est capable de s’approprier cette mallette et de porter ce message.
Lumérique, c’est également la volonté de former sur trois ans 300 formateurs pour mailler tout le territoire. C’est de toucher 100 000 enfants et 50 000 parents. Tout cela s’accompagne également d’une campagne de financement participatif que nous avons lancée au FIC, avec nos parrains, Alex Goude et Guillaume Poupard.

Comment les entreprises de la cyber peuvent-elles contribuer à cette initiative ?

Les entreprises de la cyber peuvent, au titre de leur RSE, nous aider à atteindre cet objectif et participer à notre campagne de crowdfunding. Pour faire simple, 150 euros permettent de sensibiliser une classe de 30 élèves. Nous avons besoin de cet argent pour concevoir et maintenir cette mallette, le dispositif et l’organisation qui va autour, mais surtout pour n’exclure personne de cette conversation pédagogique car il y a bon nombre de collèges et de lycées publics qui nous disent qu’ils aimeraient avoir une intervention mais qu’ils n’ont pas les fonds pour cela. 

Comment votre action s’articule-t-elle avec celle d’acteurs tels que Cybermalveillance ?

Cybermalveillance.gouv.fr aujourd’hui, sauf erreur de ma part, n’a ni le capital humain ni la vocation d’aller mailler tout un territoire. Ils le font très bien par le biais de leur plateforme d’assistance aux victimes, par les excellents guides et kits qu’ils font et sur lesquels on s’appuie d’ailleurs. Mais, aujourd’hui, le besoin est d’aller au contact et, pour aller au contact, il faut des femmes et des hommes motivés, formés, qui maillent le territoire.

Comment devient-on formateur ?

C’est simple : vous allez sur « lumerique.fr > rejoignez nous > je souhaite devenir formateur ». Vous entrez dans notre base et on vous inscrit dans un cycle de formation qui consiste en un micro e-learning suivi par une masterclass, en distanciel ou en présentiel. Celle-ci consiste en un atelier, de la même manière que si vous étiez des collégiens ou des lycéens. En sortant de là, pendant une heure, vous allez vous approprier un certain nombre d’éléments de la mallette pédagogique que vous allez ensuite rejouer devant nous et devant vos pairs. À la suite de cela, vous êtes autonome et vous pouvez aller en établissement scolaire. Ainsi, le 18 octobre 2024, au collège Modigliani dans le XVe arrondissement de Paris, nous avons accueilli 30 adultes le matin, nous leur avons déroulé ce programme et, à 11h00, ils sont allés dans toutes les classes et ont formé, sensibilisé, 500 collégiens et collégiennes pendant une heure.

C’est compliqué de sensibiliser les jeunes à la cyber ?

Pour nous, l’idée, avant de parler cyber, c’est de parler culture générale numérique. On en a fait l’expérience au début, quand on est allé en établissement scolaire avec nos gros sabots en déclarant « il ne faut pas partager ton mot de passe ». Mais les jeunes nous ont dit « vous êtes bien mignons mais moi je dois partager mon mot de passe quand je suis en vacances pour maintenir la flamme sur Snap ». Ça, c’est un exemple parmi tant d’autres. Donc on s’est dit avant de parler hygiène numérique stricto sensu, pour qu’ils tendent l’oreille, il va falloir qu’on déconstruise un certain nombre de choses. C’est-à-dire qu’on leur dise « pourquoi c’est gratuit ? », « quand tu envoies une nude ou un message même anodin sur Whatsapp, peux-tu me dessiner sur une carte du monde le trajet de ton message ? », « connais-tu les nationalités des entreprises dont tu utilises les services ? », « sais-tu que le que le Tik tok chinois se comporte différemment que le Tik Tok du reste du monde ? ». Ce sont véritablement ces points-là qui permettent d’asseoir un niveau minimum de culture numérique, qui donnent des éléments d’aide à la décision et à la compréhension pour après, dans un deuxième temps, aller greffer d’autres ateliers qui sont des tutos pratiques sur des sujets vraiment cyber, comme par exemple, mettre en place la vérification en deux étapes.

Un mot pour la fin ?

Notre souhait est d’être le plus large possible : la main est tendue à toutes et à tous, à toutes les organisations, toutes les associations… La montagne est trop haute pour qu’un acteur puisse seul la gravir, y compris aujourd’hui dans le contexte géopolitique que l’on connaît. On a tous le même objectif, celui d’une bascule collective.