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La bitcoin mania inquiète

Cybercriminalité, bulle spéculative sur le point d’exploser : 2018 sera-t-elle l’année de tous les dangers pour le bitcoin ? 

A son lancement, en février 2009, un bitcoin ne coûtait que quelques cents et au début de l’année 2017, il valait 966 dollars. Depuis, cette monnaie virtuelle autorégulée, qui préserve l’anonymat de ses propriétaires, a sans cesse vu son cours progresser. Les débuts en Bourse du bitcoin sur le Chicago Board Options Exchange le 10 décembre dernier confirmait l’intérêt des investisseurs pour la crypto-monnaie la plus connue et la plus courue, avec une ouverture à 15 000 dollars. Le 20 décembre, la monnaie numérique tournait entre les 16 000 et 17 000 dollars (connaître la valeur du bitcoin). La bitcoin mania se répand dans le monde alors que l’on estime sa communauté entre 20 à 30 millions dans le monde, avec une bonne moitié aux Etats-Unis et plus de 100 000 en France…

Investir et être salarié en bitcoin

Une société japonaise de services en ligne, GMO Internet, a indiqué à l’AFP qu’elle allait bientôt proposer à ses salariés d’être partiellement rémunérés en bitcoin. Elle donnera à partir de février prochain à ses quelque 4 000 employés au Japon la possibilité de percevoir jusqu’à 100 000 yens de leur paie mensuelle (près de 756 euros) en bitcoins, a expliqué un porte-parole.

En Corée du Sud, investir dans les crypto-monnaies est devenu très populaire. Les échanges sud-coréens de bitcoins représentent environ 20 % des échanges mondiaux de la devise. Selon les estimations, un million de Sud-Coréens, pour les plupart des investisseurs à la petite semaine, possèdent des bitcoins. La demande est si forte que le cours du bitcoin dans le pays excède de 20% celui aux Etats-Unis, son plus grand marché.

Aux Pays-Bas, une famille a vendu son entreprise, sa maison, deux voitures, une moto et l’ensemble de ses possessions pour investir toutes ses économies dans le bitcoin dans l’espoir de devenir un jour millionnaire. « Nous misons tout sur le bitcoin, nous avons tout vendu pour investir dans cette monnaie« , a affirmé Didi Taihuttu, auto-entrepreneur néerlandais de 39 ans qui vit désormais dans un camping avec sa famille « pour mettre le plus d’argent de côté et le transformer en bitcoins« . « D’ici 2020, un bitcoin vaudra probablement 25 000 euros ». Et si « par malheur » le cours s’effondre, lui et sa famille se retrouveront « à la case départ« . « Mais nous ne voulons surtout pas vivre dans la peur« , ajoute M. Taihuttu, informaticien encore récemment à la tête de seize employés. Didi Taihuttu sera-t-il l’homme le plus riche au monde d’ici quelques années grâce à ce pari fou?

Réguler les monnaies virtuelles

Ou peut-être le plus pauvre ? Car le bond de la valeur du bitcoin, qui rattrapait le cours de l’or en mars dernier, commence à inquiéter les observateurs des marchés financiers, qui sont de plus en plus nombreux à craindre un effondrement du bitcoin. La bulle spéculative autour de cette monnaie virtuelle pourrait conduire à un krach boursier et suivre le destin de bulles spéculatives antérieures comme l’indique des données compilées par Bloomberg. Le cours sur coût de transaction du bitcoin s’élevait à 708 fin novembre 2017, à comparer au ratio cours sur bénéfices du marché immobilier de 51 aux États-Unis dans les années 2000, et à celui de la bulle Internet de 175 dans les années 1990.

Infographie: Le bitcoin va-t-il faire plop ? | Statista

Le gouvernement français entend officiellement mettre fin à la bitcoin mania au nom de la protection des épargnants. Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a déclaré que la France et les autres pays membres du G20 avait le pouvoir de « réguler le bitcoin ». « Je suis là pour garantir la sécurité aux épargnants […] Il faut le regarder, l’examiner, et regarder comment, avec tous les autres pays membres du G20, nous pouvons réguler le bitcoin », a indiqué le ministre à LCI. Valdis Dombrovskis, vice-président de la commission européenne chargé de l’Euro, souhaite moderniser « de façon urgente » les règles financières pour faire face à la volatilité du bitcoin. Il existe selon lui « des risques évidents pour les investisseurs et les consommateurs liés à la volatilité, incluant le risque d’une perte complète de leur investissement, et celle d’une manipulation du marché. » Les États de l’Union Européenne se sont déjà mis d’accord le 15 décembre pour mettre fin à l’anonymat des transactions sur les plateformes d’échange qui devront désormais identifier leurs utilisateurs, et cela dans le cadre de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme

 

Les crypto-monnaies deviennent une cible de choix pour les cybercriminels

Il y a quelques jours, Youbit, une plateforme sud-coréenne d’échange de monnaies cryptographiques, s’est déclaré en faillite après avoir été
victime de piratage à deux reprises cette année, illustrant les dangers de
devises virtuelles qui ont le vent en poupe. La plateforme a déclaré qu’elle avait perdu 17 % de ses actifs dans cette attaque. Huit mois auparavant, près de 4 000 bitcoins – d’une valeur alors estimée à 5,5 milliards de wons (5 millions de dollars) – et qui représentait près de 40 % de ses actifs, avaient été dérobés dans une cyberattaque imputée à la Corée du Nord. « Nous allons fermer tous les échanges, suspendre tous les dépôts et les retraits et prendre des mesures pour déclarer la faillite« , a dit Youbit dans un communiqué. Les actifs en crypto-monnaie des clients seront dévalués de 25%, a ajouté la plateforme, qui explique qu’elle fera de son mieux pour « minimiser » leurs pertes grâce aux assurances et en vendant ce qui reste de l’entreprise. La plateforme fondée en 2013 se spécialisait dans les échanges de multiples monnaies virtuelles, dont le bitcoin et ethereum. Lire notre article : Monnaie virtuelle : les cyberattaques de la Corée du Nord utilisées pour financer les programmes nucléaire et balistique

D’autres plateformes ont subi le même sort en raison de piratage. En 2015, MtGox a perdu 650 000 bitcoins et fait faillite. En 2016, Bitfinex a perdu 65 millions de dollars. En 2017, début décembre, on peut citer « le casse » de NiceHash : 63,9 millions de dollars envolés.

Selon Kaspersky Labs, les crypto-monnaies vont devenir de véritables cibles, et voir ainsi le nombre d’outils et techniques avancés, créateurs de profit pour les cybercriminels, croître. L’éditeur de logiciels de cybersécurité prédit que les attaques de ransomware vont forcer les gens à acheter de la crypto-monnaie, et ce, à cause de son marché non-régulé et quasi anonyme qui vont pousser les criminels à demander des rançons en crypto-monnaies. « La crypto-monnaie n’est plus une technologie de demain. Elle fait déjà partie intégrante de notre quotidien, se répand  activement à travers le monde, devient plus accessible pour les utilisateurs et constitue une cible de plus en plus tentante pour les criminels. Dernièrement, nous avons observé une recrudescence des attaques de malwares ciblant différents types de crypto-monnaies et nous nous attendons à voir cette tendance se poursuivre », indiquait début novembre Sergey Yunakovsky, analyste en malware chez Kaspersky Lab alors que l’éditeur venait de découvrir un nouveau malware nommé CryptoShuffler.
Lire notre article Les mineurs de cryptomonnaies, des vampires suçeurs de CPU

 

 

Auteur : Juliette Paoli avec AFP