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Initiative – L’ONG Sistech accompagne les femmes réfugiées dans l’emploi numérique

Joséphine Goube, fondatrice et Pdg de Sistech. Crédit: Sistech
Joséphine Goube, fondatrice et Pdg de Sistech. Crédit: Sistech

L’ONG Sistech souhaite accompagner 1 % des femmes réfugiées qui arriveront en Europe d’ici à 2033, par un programme d’accompagnement débouchant sur un emploi dans la tech et le numérique. Actuellement proposé en France, en Italie et en Grèce, 550 femmes y ont déjà participé. Questions à Joséphine Goube, fondatrice et P-DG de Sistech.

 

Pourquoi avoir créé Sistech ?

Joséphine Goube : Depuis 2017, année où je l’ai fondée, l’organisation Sistech – qui signifie Sisters in Technology – favorise l’autonomie des femmes réfugiées à travers des emplois dans la tech et le numérique. C’est un spin-off de l’organisation internationale Techfugees, qui œuvre à l’inclusion des personnes déplacées.

Notre nom reflète notre ADN : nous sommes une communauté de femmes qui défendons l’autonomie d’autres femmes. J’ai en effet constaté que les femmes réfugiées sont confrontées à un taux de chômage élevé, même des années après leur arrivée dans leur pays d’accueil, et deux fois supérieur au taux des hommes réfugiés. Afin d’obtenir un salaire, elles sont souvent contraintes d’accepter des emplois pour lesquels elles sont surqualifiées. Au même moment, le secteur de la tech, en plein essor, peine à recruter et à retenir de nouveaux collaborateurs. Cela est particulièrement vrai lorsqu’il s’agit d’embaucher des femmes.

« Les femmes réfugiées sont confrontées à un taux de chômage élevé, même des années après leur arrivée. »

Quels sont vos objectifs ?

Sistech a pour but d’accompagner les femmes réfugiées à retrouver un emploi à la hauteur de leur qualifications dans le numérique. Nous nous sommes fixé l’objectif de servir 1 % de ces femmes, en âge de travailler, qui arriveront en Europe d’ici à 2033. Nous évaluons ce chiffre à 11 000 femmes. Mais la géopolitique du monde nous échappe assez pour qu’il soit dur de le prédire. Nous souhaitons également contribuer à la richesse des connaissances et des pratiques de l’écosystème au service des femmes réfugiées.

Quelles ont été vos actions jusqu’à aujourd’hui ?

Le premier programme de Sistech était un programme test à Paris, le #TF4Women Fellowship. Il a proposé gratuitement à un groupe de 12 femmes des compétences techniques et des connaissances du marché du travail pour démarrer une recherche d’emploi. Trois quarts d’entre elles ont fini par trouver une opportunité professionnelle. En 2019, 80 % des femmes du deuxième groupe ont retrouvé un emploi dans un métier tech. Les participantes à nos programmes sont appelées Fellows.

Convaincus que ce succès repose sur une méthode et ingénierie pédagogique bien rodé, nous avons diversifié notre offre et nous sommes étendus géographiquement. Sistech a lancé ses premiers programmes en Grèce et en Italie en 2021, où le besoin de soutenir les femmes réfugiées en Europe était le plus important.

Quels sont vos partenariats avec les entreprises ?

Nos partenariats varient dans la forme et dans la durée. Idéalement, nous recherchons des partenariats à long terme, dans lesquels les entreprises s’engagent à financer des bourses pour les Fellows, encouragent leurs employés à devenir bénévoles, mentors ou formateurs dans nos programmes, et embauchent des Fellows. Cependant, nous nous adaptons aux objectifs, ressources et possibilités de chaque entreprise. Ainsi, notre ONG a progressivement noué des relations avec plus d’une centaine d’entreprises, comme Orange, Cisco, Ubisoft, VMware, HR Team (groupe Scalian), LinkedIn, Hays, Coursera, Openclassrooms. Elles reconnaissent la diversité comme une richesse et un moteur de l’innovation. Les entreprises partenaires embauchent des participantes des programmes Sistech, aident à financer les opérations de l’organisation, et profitent des opportunités de bénévolat et de mentorat pour leurs salariés.

« Un programme en 3 étapes – orientation, formation et mentorat – avec pour objectif la réinsertion professionnelle »

Comment se déroule votre programme ?

Notre accompagnement est progressif et se compose de trois étapes qui concourent à accélérer l’inclusion professionnelle des femmes réfugiées : l’orientation, la formation et le mentorat avec pour objectif la réinsertion professionnelle. L’accompagnement est personnalisé selon leurs besoins et leurs progrès dans chaque phase. Les valeurs d’autonomie et de cocréation sont mises en avant : les Fellows décident si elles sont prêtes à passer à l’étape suivante du parcours, de faire une pause ou d’y mettre un terme.

Les bénévoles accompagnent le parcours avec leur expérience et expertise professionnelle dans l’idée de transmettre des connaissances utiles à leurs besoins. Chaque programme va de pair avec un accompagnement psychosocial, un soutien personnalisé à la garde d’enfant et le prêt de matériel informatique pour suivre les sessions à distance.

Quels sont vos résultats ?

Sistech a accompagné plus de 550 femmes depuis cinq ans. En 2023, nous avons accepté environ 250 femmes dans nos programmes en France, en Italie et en Grèce, et nous accompagnerons plus de 300 femmes en 2024.

« Sistech a accompagné plus de 550 femmes depuis cinq ans. »

Plus de 850 personnes, dont 550 en France, se sont mobilisées en tant que mentor, formateur, tandem linguistique (qui parle avec la réfugiée de façon informelle dans un contexte professionnel dans la langue du pays d’accueil) ou en accueillant la femme pendant une journée d’immersion).

Suivez-vous l’intégration professionnelle des femmes formées ?

Oui. Nous suivons les Fellows pendant une période de deux ans après la fin de nos programmes. Notre activité est plus importante juste après la fin du programme, mais l’objectif reste le même : la signature d’un contrat professionnel.

Quels sont vos projets de développement ?

Notre objectif actuel est d’offrir les mêmes programmes, en termes de contenu et de qualité, aux femmes que nous accompagnons en France, en Italie et en Grèce. Nous recherchons davantage d’entreprises qui souhaitent financer des bourses pour les Fellows et les embaucher une fois leurs programmes terminés. Nous aimerions étendre notre travail à l’Allemagne, qui considère le potentiel professionnel des réfugiés sous un angle très pragmatique et positif.