À mesure que l’IA industrielle s’impose dans les datacenters, les tensions ne se limitent plus aux GPU. En sécurisant l’accès à des lasers optiques critiques, Nvidia met en lumière une nouvelle fragilité structurelle des infrastructures IA mondiales.
Un composant invisible devenu critique
La course à l’intelligence artificielle ne se joue plus seulement sur les GPU ou les quantités de serveurs, elle commence aussi très en amont, au niveau de composants optiques invisibles mais essentiels. Avec l’explosion des besoins en interconnexions à très haute vitesse dans les centres de données IA, certains types de lasers, utilisés pour faire circuler les données grâce à la fibre optique à l’intérieur des racks, sont devenus un véritable goulet d’étranglement. Dans ce contexte, la demande pour les modules optiques ultra-rapides, notamment en 800G et au-delà, devrait presque tripler entre 2025 et 2026. Une dynamique qui exerce une pression inédite sur une chaîne industrielle déjà étroite.
Nvidia sécurise la chaîne en amont
Face à cette tension, Nvidia a sécurisé massivement la capacité de production d’un laser dit EML (Electro-Absorption Modulated Laser), un composant complexe fabriqué par un nombre très limité d’acteurs. Cette pré-allocation, logique d’un point de vue stratégique, a toutefois pour effet immédiat d’allonger les délais de livraison, parfois bien au-delà de 2027, et de réduire l’offre disponible pour d’autres acteurs du cloud. Sans créer la pénurie à elle seule, l’entreprise accentue mécaniquement la rareté d’un composant devenu clé pour les architectures IA à grande échelle.
Un marché contraint de s’adapter
Pour les hyperscalers et opérateurs qui n’ont pas accès à ces volumes réservés, la situation impose des arbitrages. Certains explorent des alternatives technologiques, comme les lasers CW associés à la photonique sur silicium, au prix de compromis techniques ou de maturité industrielle encore incomplète. Ce mouvement illustre un déplacement du rapport de force. La compétition ne se limite plus aux performances des puces, mais s’étend à la maîtrise de toute la chaîne matérielle, y compris ses briques les plus spécialisées.
Un signal d’alerte pour l’IA industrielle
Cet épisode rappelle les grandes pénuries de composants du début des années 2020. À mesure que l’IA s’industrialise, la dépendance à quelques technologies critiques et fournisseurs rares devient un facteur de risque majeur. Pour les acteurs du cloud et des infrastructures, la question dépasse désormais l’accès aux GPU puisqu’elle touche à la résilience même des chaînes d’approvisionnement de l’IA.








