Le passage au full cloud ne se résume plus à un simple projet d’infrastructure : il s’agit d’une véritable transformation culturelle, technique et organisationnelle. Dans cet avis d’expert, Yassine El Fadili, Business Unit Manager Infrastructure et Cloud chez Intelcia IT Solutions, revient sur les conditions d’une migration réussie : évaluation du système d’information, gouvernance FinOps et AIOps, accompagnement humain, et choix stratégique entre cloud hybride, multi-cloud et cloud souverain.
Adopté pour sa promesse d’agilité, de performance et de résilience, le basculement massif vers le cloud s’impose comme un levier stratégique de transformation des systèmes d’information. Pour autant, le passage au full cloud requiert expertise et préparation. Pour réussir cette mutation, les entreprises doivent repenser leur gouvernance IT, anticiper les dépendances applicatives, et sécuriser les opérations. Migrer vers le cloud est une évolution de culture, de méthode et de pilotage.
Dans un environnement où les entreprises cherchent à gagner en réactivité, maîtriser leurs coûts et renforcer leur résilience, le full cloud se positionne comme une réponse adaptée. Il ne s’agit plus simplement de dématérialiser des infrastructures, mais de transformer en profondeur la façon dont les services IT sont consommés, pilotés et alignés sur les besoins métiers.
Réduction des coûts, accélération des cycles : le cloud en action
Avec la migration, les bénéfices sont concrets : une réduction des coûts de 20 à 25 % peut être espérée, tout en promettant une capacité d’innovation décuplée. Des centaines de mises en production peuvent être réalisées en une journée, alors qu’elles prenaient plusieurs semaines dans un environnement on-premise. La rapidité d’exécution devient un avantage compétitif.
Prenons le cas d’un grand groupe du secteur de la grande distribution, présent dans plus de 30 pays. Dans le cadre d’un plan de transformation ambitieux, cette organisation a fait le choix de migrer une partie significative de son infrastructure vers une solution de type Google Cloud VMware Engine, en fermant progressivement ses datacenters historiques on-premise.
Cette transition a permis une modernisation en profondeur tout en garantissant la continuité des opérations pour les collaborateurs et les clients, grâce à une extension transparente des environnements existants. À la clé : une réduction des coûts d’exploitation de 40 %, et une diminution de la consommation énergétique de 45 %.
Diagnostic préalable : maturité du SI et cartographie
La première étape d’une migration réussie repose sur une évaluation rigoureuse du système d’information existant. Cela implique une analyse de l’infrastructure, du niveau d’obsolescence des actifs logiciels et matériels, des interdépendances applicatives et des flux de données. Une cartographie exhaustive est indispensable pour définir les priorités de migration et anticiper les risques opérationnels.
Selon le profil applicatif, plusieurs scénarios sont possibles : un simple “lift & shift” pour des applications peu critiques, une refactorisation pour tirer parti des services cloud natifs, ou une refonte complète pour moderniser les briques stratégiques.
Dimension humaine et conduite du changement
La réussite du passage au cloud repose aussi beaucoup sur l’humain. Il est fondamental d’impliquer dès le départ les parties prenantes : DSI, métiers, équipes projet, opérationnels. Former, acculturer, et rassurer les équipes atténue les freins naturels face au changement, notamment les craintes de perte de contrôle ou de compétence.
Une approche par vagues, hiérarchisée selon la criticité et la complexité des applications, est préférable à un basculement global. En démarrant par les briques simples et critiques, puis en abordant les modules plus sensibles avec des environnements de test et de réplication, l’entreprise peut assurer la continuité de service tout en limitant les risques de rupture.
Gouvernance cloud : FinOps, AIOps…
Par ailleurs, un système d’information cloudifié requiert une gouvernance adaptée. Trois piliers sont essentiels :
- FinOps : pour suivre en temps réel les coûts d’usage, optimiser les ressources et prévenir les dérives budgétaires.
- AIOps : pour détecter et résoudre automatiquement les incidents, améliorer la disponibilité des ressources et réduire le temps moyen de résolution (MTTR).Cela permet à la DSI de libérer du temps pour l’innovation métier et l’accompagnement des équipes opérationnelles
- Conformité & sécurité : pour garantir le respect des référentiels (ISO, SecNumCloud, RGPD) et préserver l’intégrité des données.
Après la migration, l’infogérance doit évoluer. Il ne s’agit plus de gérer des serveurs physiques mais d’orchestrer les services, d’automatiser les déploiements, et de piloter les performances en temps réel. L’hypervision applicative, croisant indicateurs techniques et métiers, devient un levier de pilotage agile indispensable.
Le full cloud est une étape structurante vers un modèle d’IT agile, automatisé, prédictif et résilient. Il ne se limite pas à un fournisseur unique : il s’exprime aujourd’hui dans des modèles hybrides et multi-cloud, adaptés aux besoins métiers et aux contraintes réglementaires. Les entreprises françaises s’orientent ainsi vers un modèle hybride : multi-cloud comme standard, cloud souverain pour les données sensibles, et SaaS pour les applications non différenciantes. Le rôle d’une ESN est d’orchestrer ces choix, d’assurer l’interopérabilité et d’accompagner les entreprises pour éviter le lock-in.








