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AVIS D’EXPERT – Cybersécurité en 2026 : les réglementations et les attaques vont s’intensifier, mais les entreprises peinent encore à suivre

« Entre explosion des attaques, sophistication des menaces IA et exigences croissantes de conformité, 2026 s’annonce comme une année charnière pour la cybersécurité. Dans cet avis expert, Rémi Enjolras, Head of Cybersecurity & Data France chez Splunk, met en lumière les vulnérabilités persistantes des organisations et les chantiers essentiels pour renforcer durablement leur résilience.
Sous l’impulsion de nouvelles réglementations, la cybersécurité s’est imposée en 2025 comme une responsabilité de premier plan pour les entreprises. Or, cette dynamique réglementaire, incarnée par des directives telles que NIS2 redéfinit les attentes. Les gouvernements exigent désormais des preuves tangibles : dispositifs de supervision, plans de continuité, évaluations de risques ou encore procédures de réponse aux incidents.
Toutefois, entre les textes et leur application, un écart persiste. Beaucoup d’organisations peinent à transformer ces obligations en actions concrètes, faute de moyens, de compétences ou de coordination interne. Alors que la résilience opérationnelle devient la norme et non plus l’exception, quels sont les chantiers stratégiques cyber auxquels les entreprises vont devoir faire face en 2026 ?

La sécurité des chaînes d’approvisionnement continuera d’être le talon d’Achille des organisations

Les nouvelles réglementations ne se limitent plus à la sécurité interne : elles imposent désormais aux entreprises de garantir la résilience de leurs fournisseurs et partenaires. Autrement dit, la cybersécurité devient une responsabilité partagée tout au long de la chaîne d’approvisionnement.
Mais cette exigence révèle une faiblesse structurelle. Les chaînes d’approvisionnement sont souvent les maillons les plus vulnérables d’un écosystème, puisqu’elles réunissent de multiples prestataires, sous-traitants et partenaires dont la maturité cyber varie considérablement. Les cybercriminels l’ont bien compris : plutôt que de s’attaquer à une grande entreprise, mieux vaut infiltrer un fournisseur plus petit et moins protégé, pour remonter discrètement jusqu’à la cible principale. Ce type d’attaque est devenu monnaie courante au cours de l’année 2025, une tendance qui devrait très certainement se poursuivre en 2026.
Pour répondre à ce défi, les entreprises doivent dès aujourd’hui amorcer un changement culturel et structurel. La cybersécurité doit devenir une exigence transversale, portée à la fois par les directions techniques, juridiques et financières. Cela passe par la mise en place de programmes interfonctionnels, de clauses contractuelles de conformité, d’audits externes, et d’une obligation de reporting pour les fournisseurs critiques. En d’autres termes, il faut briser les silos pour construire une chaîne de confiance numérique.

L’importance d’une « hygiène cyber » constante

Les menaces deviennent de plus en plus sophistiquées et 2025 a vu l’émergence d’attaques spectaculaires recourant à l’IA, aux agents autonomes ou encore aux ransomwares polymorphes. Pourtant, ce sont toujours les mêmes erreurs qui ouvrent la porte aux intrusions.
Les cybercriminels appliquent une logique économique : ils investissent le minimum d’efforts pour le maximum de gain. En 2026, tant que certaines entreprises n’appliqueront pas les fondamentaux à la fois technique, (authentification multifacteur (MFA), segmentation réseau, gestion des accès, mise à jour régulière des systèmes) et humains (formation et sensibilisation continue des collaborateurs aux différentes tentatives d’hameçonnage), ces failles resteront les points d’entrée les plus rentables.
Si l’IA a, certes, abaissé la barrière d’entrée pour les attaquants, cette évolution renforce d’autant plus la nécessité de maîtriser les bases. La sécurité, tout comme la santé, repose sur une discipline quotidienne. Une protection efficace ne dépend pas uniquement de la sophistication des outils, mais de la cohérence et de la constance dans leur application.

Anticiper la nouvelle génération d’attaques pilotées par l’IA

Si les fondamentaux demeurent indispensables, les organisations doivent aussi se préparer à une mutation profonde du paysage des menaces. Les premiers logiciels malveillants intégrant des capacités d’IA ont été observés en 2025. L’un d’eux ne contenait aucune instruction statique ; il s’appuyait sur un grand modèle de langage (LLM) embarqué, capable de générer dynamiquement les commandes les plus adaptées à chaque système ciblé. Une forme d’attaque polymorphe, adaptable en temps réel.
Des chercheurs ont également démontré la faisabilité de ransomwares « intelligents », capables d’analyser leur environnement, d’identifier les fichiers les plus critiques, puis de générer automatiquement des scripts de chiffrement sur mesure. Ces prototypes préfigurent une nouvelle ère d’automatisation offensive.
Enfin, l’IA renforce la puissance des techniques d’ingénierie sociale : clonage de voix pour usurper des identités, rédaction automatique d’e-mails crédibles, manipulation de conversations en temps réel… autant de moyens de tromper les employés les plus vigilants.
Pour les entreprises, cela signifie que les lignes de défense traditionnelles, bien qu’essentielles, doivent être complétées par d’autres mesures. En 2026, elles devront veiller à combiner supervision continue, détection comportementale et capacités d’analyse assistées par IA, tout en maintenant un haut niveau de sensibilisation humaine.

Préparer les équipes SOC à la prochaine décennie

Si l’IA transforme la nature des attaques, elle joue également un rôle stratégique en matière de cyberdéfense. Dans les SOC, de nombreuses tâches répétitives peuvent déjà être automatisées. Cela libère du temps pour des analyses plus stratégiques, mais bouleverse aussi la structure des équipes.
Comment former un analyste débutant lorsque les tâches de niveau 1 sont effectuées par une IA ? Comment éviter que les collaborateurs expérimentés ne se sentent remplacés par la machine ? Ces questions deviennent centrales pour la rétention et la motivation des talents. Les entreprises devront choisir : valoriser la productivité immédiate ou préserver la compétence humaine, socle de toute défense durable.
À terme, les organisations qui tireront leur épingle du jeu seront celles qui anticiperont ces mutations dès aujourd’hui. Former autrement, repenser les carrières, décloisonner la gouvernance, exploiter l’IA : c’est ainsi que la cybersécurité deviendra un réel levier de compétitivité. Car face à des attaques toujours plus automatisées, la vraie valeur humaine, c’est la capacité d’adaptation.