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AVIS D’EXPERT – Téléphonie sur IP : se détacher des GAFAM grâce aux standards et à l’open source

Jehan Monnier, cofondateur de Belledonne Communications, alerte sur la dépendance croissante des organisations aux solutions de téléphonie sur IP des GAFAM. Il défend une approche fondée sur les standards ouverts et l’open source, seule voie, selon lui, pour retrouver maîtrise, interopérabilité et souveraineté dans les communications.

Les solutions de téléphonie sur IP proposées par les GAFAM séduisent par leur apparente simplicité. Mais derrière ces offres clés en main se cachent des risques croissants : dépendance technologique, hausse unilatérale des prix, exposition juridique. Pour les entreprises et collectivités, il devient alors urgent de reprendre la main sur leurs infrastructures de communication. Miser sur des standards ouverts comme SIP et sur des solutions open source professionnelles, c’est retrouver la maîtrise de son infrastructure. Et garantir une architecture durable, interopérable et souveraine.

Le piège des GAFAM

En quelques années, les GAFAM ont imposé leurs solutions de téléphonie sur IP dans les PME et les ETI. Microsoft, avec Teams Phone, détient à lui seul près de 45 % du marché mondial, loin devant Cisco ou Zoom. Cette progression s’est accélérée avec la crise sanitaire, qui a poussé de nombreuses entreprises à déployer rapidement des outils de communication unifiée, souvent sans réflexion sur la pérennité ou la souveraineté des solutions adoptées. Ces plateformes sont pensées comme des écosystèmes fermés, utilisant des protocoles propriétaires, difficilement interopérables avec le reste du système d’information. Résultat, la flexibilité diminue, et chaque évolution, même mineure, devient un projet coûteux.

D’ailleurs, depuis avril 2025, Microsoft a augmenté de 25 % le prix des licences Teams Phone. Et les clients n’ont eu d’autre choix que de suivre. Faute d’interopérabilité, tout changement devient risqué, long, et coûteux. Ce verrouillage prive les entreprises de leviers d’action : ils ne choisissent plus leurs outils, ils les subissent. Et c’est précisément cette perte de liberté qui fragilise les organisations, tant sur le plan opérationnel que stratégique.

Standards ouverts et solutions open source : la voie technique vers la souveraineté

Face à l’enfermement progressif des solutions propriétaires, les standards ouverts offrent une alternative de nature à restaurer la liberté de choix. Dans le domaine de la téléphonie sur IP, le protocole SIP s’impose comme la référence. Robuste, éprouvé et largement adopté, il permet à différents logiciels et équipements de communiquer entre eux sans dépendance à un fournisseur unique. C’est aussi un protocole multimédia : il prend en charge voix, vidéo et messagerie, ouvrant la voie à des solutions de communication unifiées entièrement interopérables.

Restait à proposer un modèle de distribution qui soit, lui aussi, ouvert : c’est là qu’intervient l’open source. Portées par des éditeurs français et européens, des solutions comme Linphone, Xivo, Jami ou Element proposent des outils de communications unifiées crédibles,

bâtis sur ces standards ouverts. Elles s’intègrent aux infrastructures existantes, dialoguent avec les annuaires LDAP ou Active Directory, et respectent les standards d’authentification modernes. Surtout, contrairement à une idée reçue, ces outils sont soutenus par des acteurs solides, proposent du support professionnel, des SLA, et une expérience utilisateur soignée.

Liberté de choix, liberté d’action

Dans ces conditions, l’open source n’est plus un choix militant, c’est un choix rationnel. De nombreux éditeurs français proposent désormais des offres de communications unifiées basées sur le protocole SIP et clés en main, déployables sur site ou en cloud souverain, accompagnées d’engagements de service clairs.

Pour les entreprises comme pour les collectivités, la transition peut se faire par étapes. Certaines choisissent de conserver leur infrastructure existante (PBX, téléphones SIP) tout en déployant un softphone open source sur les postes de travail. D’autres commencent par une phase pilote auprès de quelques utilisateurs, puis élargissent progressivement le déploiement après validation technique et retour d’usage. Cette approche progressive permet d’éviter les ruptures, de sécuriser les usages et d’impliquer les équipes dans l’adoption de nouveaux outils, sans remettre en cause l’ensemble du système.

Ainsi, reprendre le contrôle sur sa téléphonie, c’est d’abord choisir un cadre ouvert, modulaire et interopérable. Les briques existent, les partenaires aussi. Encore faut-il avoir la volonté de les assembler selon ses propres règles, et non celles dictées par les éditeurs propriétaires.