Entre méfiance croissante, explosion des fraudes et inquiétudes liées à l’IA, la confiance numérique s’effrite en France. Dans cet avis d’expert, Charles Thomassin, Directeur Commercial pour la France de Ping Identity, analyse les raisons profondes de cette défiance et rappelle que la protection de l’identité, la transparence algorithmique et des mécanismes d’authentification robustes deviennent désormais des leviers essentiels pour restaurer une relation de confiance durable entre consommateurs et entreprises.
En France, le recours aux plateformes et services numériques est largement répandu parmi les consommateurs. Cela est particulièrement visible dans le domaine des achats en ligne où la proportion de Français se distingue nettement de la moyenne européenne : en 2023, 66 % des Français ont effectué des transactions en ligne, un chiffre supérieur à la moyenne de l’Union européenne, qui s’établissait à 58 %[1].
Les consommateurs français apprécient la diversité des produits en ligne et la facilité d’achat. Cependant, une majorité d’entre eux (76 %[2]) s’inquiètent aussi des fraudes en ligne, craignant notamment le vol d’identité. Cette préoccupation est d’autant plus notable que les Français sont, en réalité, moins touchés par la fraude en ligne que la moyenne européenne.
D’où provient ce manque de confiance ? Ce ressenti montre que la confiance ne dépend pas uniquement de la sécurité technique. Cela dépend surtout de la capacité des entreprises à démontrer leur fiabilité et leur transparence dans un environnement dominé par l’IA où discerner le vrai du faux devient de plus en plus difficile.
Une anxiété numérique bien française
Une récente étude de Talker Research réalisée pour Ping Identity révèle une inquiétude croissante des Français concernant la sécurité de leurs données : 75 % d’entre eux se disent plus préoccupés qu’il y a cinq ans. Cette méfiance se traduit par une faible confiance envers les entreprises quant à la gestion de leurs données d’identité. Ainsi seulement 8 % des Français leur font pleinement confiance, soit deux fois moins que la moyenne mondiale. Ce phénomène s’explique par une culture du doute omniprésente, elle-même renforcée par les nombreux scandales de fuites de données au niveau national et par un manque de clarté autour des pratiques numériques.
En conséquence, un certain nombre de consommateurs privilégient la sécurité numérique au détriment du confort offert par les achats en ligne : 38 % d’entre eux abandonnent leurs achats en ligne et 36 % leurs achats via les réseaux sociaux.
L’IA, catalyseur d’une défiance accrue
La généralisation de l’IA ne fait qu’exacerber cette tendance. Bien que de plus en plus présente dans nos quotidiens une part significative des consommateurs français (45 %) ne l’utilisent pas du tout. Il est vrai que malgré son côté pratique et facilitateur, l’IA peut être utilisée à des fins malveillantes, notamment pour améliorer les techniques de fraude. Ainsi, l’étude révèle que le phishing dopé à l’IA (36 %) devient, à raison, la menace la plus redoutée par les consommateurs. On peut conclure que les Français font preuve d’une méfiance « informée » ; ils comprennent mieux les risques, mais ils manquent encore d’outils pour les maîtriser.
En 2025, des deepfakes toujours plus sophistiqués prolifèrent de manière alarmante, les agents autonomes possèdent des capacités d’interactions de plus en plus réalistes et les arnaques alimentées par l’IA se multiplient. Dans ce contexte, la question de la protection de l’identité est devenue un enjeu central de la relation client.
La confiance numérique : nouveau pilier stratégique de la relation client
À l’ère du doute, la confiance n’est pas seulement un argument marketing ; elle doit être érigée en pilier stratégique fondamental pour l’entreprise. Trois approches permettent d’y parvenir :
- Authentification robuste : Renforcez la confiance des consommateurs sans compromettre l’expérience utilisateur en intégrant des méthodes d’authentification avancées telles que la biométrie ou l’authentification multifacteur (MFA) adaptative. Plus d’un tiers des personnes interrogées considèrent l’authentification biométrique et multifactorielle comme un facteur de confiance essentiel.
- Transparence Algorithmique : Expliquer clairement comment l’IA est déployée pour garantir la protection des données, plutôt que leur exploitation.
- Sécurité axée sur l’identité : Chaque action doit être vérifiable et chaque donnée contrôlable par l’utilisateur.
Des consommateurs toujours plus exigeants envers les entreprises
Contrairement à la moyenne mondiale, seuls 35 % des Français (soit 10 points de moins) estiment que la régulation gouvernementale en matière de données est “extrêmement importante”, ce qui indique qu’ils ont moins d’attentes vis-à-vis de l’État.
Il est impératif que les marques s’impliquent sérieusement dans la sécurité des données en mettant en place des standards de protection privés qui vont au-delà des exigences réglementaires minimales. Ainsi, il est essentiel que les entreprises instaurent une véritable « éthique de la donnée ».
Dans un marché de plus en plus saturé, la confiance des consommateurs devient un avantage concurrentiel déterminant pour les entreprises. Les consommateurs français ne sont pas en retard sur ce sujet, mais lucides. Leur méfiance peut se transformer en atout si elle incite les entreprises à rehausser leurs standards de sécurité. L’avenir de la relation numérique repose sur une formule simple : plus de transparence, plus de contrôle, plus de confiance. Les entreprises y parviendront grâce à une sécurité « invisible mais omniprésente », une approche révolutionnaire où la technologie protège sans jamais entraver l’utilisateur ou ses opérations. Il s’agit d’un système intelligent et proactif qui anticipe les menaces potentielles, les neutralise en arrière-plan et s’adapte en permanence pour garantir une protection optimale, sans que l’utilisateur n’ait à intervenir ou même à en prendre conscience.
[1] Économie et société à l’ère du numérique édition 2025, INSEE
[2] 2025 Consumer Survey, Ping Identity





