Accueil Les DSI et les RSSI face à la délégation de pouvoirs

Les DSI et les RSSI face à la délégation de pouvoirs

Les Directeurs des Systèmes d'Information (DSI) et les Responsables de Sécurité des Systèmes d'Information (RSSI) sont directement concernés par la question de la délégation de pouvoir.

Qu'est-ce qu'une délégation de pouvoirs ?

C'est un acte juridique par lequel le chef d'entreprise apporte la preuve qu'il a délégué à un délégataire une partie de ses pouvoirs ; délégataire qui doit être pourvu de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires pour veiller à la bonne observation des lois et règlements. Et qui dit transfert de pouvoir, dit transfert de responsabilité…

A titre d'illustration, le chef d'entreprise peut ainsi mettre en place un mécanisme de délégation concernant l'informatique, l'organisation ou encore la sécurité des systèmes et le respect des obligations Informatique et libertés.

Une délégation de pouvoirs diffère d'une délégation de signature. En revanche, une délégation de pouvoirs s'accompagne d'une délégation de signature, l'inverse n'est pas toujours vrai.

Ainsi, le délégataire pourra engager l'entreprise dans un contrat de plusieurs années (Cloud Computing, etc.) avec des conséquences financières lourdes.

Comment formaliser une délégation de pouvoir ?

La délégation de pouvoir n'est soumise à aucune condition de forme, que ce soit par la législation ou la jurisprudence. L'écrit n'est donc pas obligatoire mais il est plus que conseillé et peut, par exemple, accompagner le contrat de travail du délégataire ou faire l'objet d'un document distinct.

En pratique, force est de constater qu'une délégation de pouvoirs est remise par écrit et comporte notamment les points suivants : son objet, limité ou non, sa durée, limitée à une mission ou non, ou bien encore la faculté ou non de subdéléguer.

Il convient également de ne pas confondre les différentes formes de délégation de pouvoir comme la subdélégation et la codélégation.

Cette dernière consiste en une certaine division horizontale du pouvoir.

La subdélégation, quant à elle, consiste en la faculté pour un délégataire de transférer à l'un de ses préposés une partie des pouvoirs qui lui avaient été initialement confiés par le délégant.

La validité d'une délégation de pouvoirs

Afin d'avoir une délégation de pouvoir valable, il est notamment important :

  • Que le délégataire ait eu une connaissance précise de l'étendue de ses attributions et des responsabilités qui en découlent ;
  • Que la délégation de pouvoir ait été acceptée avant tout manquement ;
  • Que le délégataire ait un réel pouvoir de décision afin d'avoir une autonomie suffisante, qu'il ait un pouvoir de sanction suffisant afin de pouvoir disposer d'un pouvoir de commandement ;
  • Que le contenu de la délégation soit bien déterminé et que celui-ci corresponde au statut du délégataire ;
  • Que le délégataire ait les compétences suffisantes à sa fonction;
  • Que le délégataire ait accès aux moyens nécessaires (financiers, humains, matériels, etc.) à la mise en œuvre de sa mission.

A noter que la jurisprudence retient fréquemment pour vérifier la validité d'une délégation de pouvoirs, le fait que le délégataire a pu suivre des sessions de formation de manière régulière. Ainsi, il est recommandé pour le DSI ou le RSSI de formaliser par écrit ses demandes de formation.

Il convient de porter une attention particulière aux statuts de l'entreprise qui peuvent exclure expressément le recours à la délégation de pouvoirs, ou la soumettre à des conditions déterminées (par exemple, en soumettant toute délégation de pouvoirs à l'agrément des associés ou du conseil d'administration).

Gérer une éventuelle responsabilité pénale

Ainsi, une politique de délégation de pouvoir doit être instaurée, afin de mettre en correspondance la matrice des responsabilités et les pouvoirs associés, gérer une éventuelle responsabilité pénale de fait, et sensibiliser les directions opérationnelles sur la nécessité d'éviter toute négligence dans ce domaine.

Les juges ont en effet très vite admis que les dirigeants ne pouvaient pas tout surveiller dans leurs entreprises. Plus encore, le chef d'entreprise peut engager sa responsabilité pénale pour ne pas avoir délégué ses pouvoirs alors même qu'il n'était pas en mesure d'exercer une surveillance constante sur l'entreprise, du fait de sa taille. Parallèlement, le chef d'entreprise qui souhaite recourir à une délégation de pouvoir ne pourra le faire que si la taille de l'entreprise le justifie.

Dans tous les contentieux ou les précontentieux, l'un des premiers réflexes est de vérifier l'existence ou non d'une délégation, sa validité, afin de déterminer la responsabilité des acteurs de l'entreprise et les éventuelles mises en cause.

Avant d'accepter une délégation de pouvoirs, assurez-vous d'avoir connaissance des principes sur lesquels repose celle-ci, vérifiez les risques réels auxquels vous serez confronté et informez-vous sur les moyens dont vous disposerez pour réaliser votre mission. Il vous appartiendra également de délimiter vos champs d'action, de vous renseigner sur les facultés de déléguer, tout en vous assurant que votre direction sera disponible en cas de crise.

La délégation de pouvoir est donc bel et bien un moyen de prévention et de gestion des risques.

Garance Mathias est l'avocat fondateur du Cabinet Mathias, créé il y a plus de 10 ans, pour l'accompagnement des entreprises du secteur des technologies avancées et de l'internet. Elle enseigne et écrit de nombreux articles sur le sujet, notamment sur le blog du Cabinet.

http://www.avocats-mathias.fr