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Le DSI, chef d'orchestre de l'innovation

Le DSI est un artiste multidisciplinaire à la croisée des chemins. Il maîtrise plusieurs domaines pour mener à bien un rôle transversal dans l'entreprise. A la fois virtuose de la technologie, communicant, négociateur, manager, il s'avère plus ou moins bankable, selon la position qu'il s'est forgée et le degré de maturité technologique de la société. 10 DSI, de la PME au grand groupe international, nous révèlent leur passion partagée pour le «10 e art» que sont, à notre avis, les nouvelles technologies de l'information.

L'art total conjugue en même temps plusieurs disciplines dans le but de refléter l'unité de vie ; le directeur des systèmes d'information conjugue plusieurs disciplines afin de refléter l'unité de l'entreprise. Créateur, architecte, chef d'orchestre, sa polyvalence n'a d'égale que sa vision d'ensemble.«Le DSI a un rôle transverse et passionnant, s'exclame de but en blanc Sylvain Costy, en recherche d'emploi après avoir été DSI chez Fauchon et Electrogeloz. Fini le temps du directeur technique dans sa tour d'ivoire !»

Le DSI créateur

D'abord, le DSI est un fer de lance innovant. Pour François Trignan, DSI du laboratoire pharmaceutique Innothera depuis mars 2010, et spécialiste de SAP : «Le DSI, de bras armé des projets des directions métiers, travaille de plus en plus en amont pour innover. Et donner des projets novateurs à mes équipes (20 personnes en France) les motive. Une fois par an, nous nous réunissons et chacun doit proposer des idées nouvelles, en axant sur la rentabilité opérationnelle. On ne fait pas de la techno pour de la techno ! Nous sommes pragmatiques sur la valeur ajoutée. La technologie doit améliorer la rentabilité et l'efficacité de l'entreprise.»

Comme les photographes de l'ère argentique, il passe du temps en laboratoire. Laurent Chollat-Namy, directeur général adjoint Internet a créé chez Figaro Classifieds, éditeur de sites Internet d'emploi et immobilier, un lab pour les supports innovants il y a trois ans : tablettes, smartphone, 3D, télé connectée, réseaux sociaux, rien n'échappe aux trois artistes qu'il chapeaute. Si la créativité débouche sur des œuvres convaincantes, elles sont déployées. Le directeur des opérations, moyens techniques et technologiques de Mondadori France, Frédéric Lapeyre, a mis en place un labo sur la digitalisation des solutions dans le groupe de presse de 1200 salariés.

Le DSI architecte

Si la dimension technique est moins prégnante qu'au tournant du siècle, le rôle d'architecte reste dans les gènes du DSI. Pour Laurent Chollat-Namy, «la notion d'architecture est toujours présente. L'assemblage maintenable et sécurisé des technologies est de plus en plus complexe.»

Notre architecte, au-delà de la gestion de l'infrastructure, rôle qui lui est dévolu depuis la nuit des temps informatique assemble de façon cohérente des briques technologiques externes, dans un rôle d'intégrateur hors pair.

Le DSI chef d'orchestre

Dans une dimension plus fonctionnelle et dans un souci de proximité, le DSI est un chef d'orchestre, dont le sens de la communication et du relationnel prévaut, que ce soit avec les directions métiers, les utilisateurs, son équipe ou les prestataires et les fournisseurs. Hervé Guehl, DSI chez Picard depuis fin 2008, a eu «un rôle de facilitateur du décloisonnement» qu'il ne soupçonnait pas chez le distributeur de produits alimentaires surgelés : «Aujourd'hui, après la mise en place de l'ERP qui s'est avérée très structurant pour les modes de fonctionnement, les projets sont en co-construction entre le métier et l'IT.»

Le DSI accompagne les directions métier afin d'arbitrer entre leurs projets, du fait de ressources contraintes. Chez Figaro Classifieds, des entités de concertation rassemblant commerce, marketing, IT se réunissent tous les mois afin d'établir des priorités dans les portefeuilles projets pour les trois mois à venir.

L'accompagnement des utilisateurs est une image d'Epinal du rôle de la DSI. Derrière un terme devenu quasiment polysémique, les nouvelles technologies et la mobilité portent naturellement le travail de la DSI vers les utilisateurs. La méthode utilisée rend l'accompagnement efficace ou non. Ainsi, François Trignan et son équipe sont allés sur le terrain avec les visiteurs médicaux, ce qui permet d'améliorer le quotidien par petites touches impressionnistes, par exemple des iPhone qui deviennent des bornes Wi-Fi pour le PC portable.

Sylvain Costy souligne également l'art de gérer des profils très différents dans son équipe, depuis le développeur Java au chef de projet fonctionnel en passant par l'administrateur réseau. Hervé Guehl ajoute : «mon équipe de 50 personnes à la DSI de Picard est constituée de gens qui connaissent bien leur métier, le tout est ensuite de les faire communiquer.»

Le DSI est aussi un fin négociateur et a les connaissances juridiques nécessaires pour maîtriser les relations contractuelles, en relation avec le service juridique et/ou l'avocat, car c'est bien le DSI qui prend le risque d'externaliser telle brique ou tel service. Il sait manier, tel un violoniste son alto, les notions de contrat de niveau de service (SLA, Service Level Agreement), la Garantie de Temps d'Intervention (GTI) et la Garantie de Temps de Rétablissement (GTR). Il est bien fini le temps de l'artiste bohême, notre virtuose de l'IT est aussi gestionnaire.

Un art à réinventer

Le mouvement IT est perpétuel. Pour Frédéric Lapeyre, dans le groupe de presse Mondadori, qui édite trente titres et dix sites Internet associés, de Réponses Photo à Closer, depuis 2005, la technologie est «le meilleur levier pour se réinventer», dans une période de transformation de la presse, «hybride et excitante». Il met en place l'externalisation de façon progressive. Il réfléchit à la mise en place du Digital Asset Management, ou une base de données commune de contenus (articles, photos) pour toutes les rédactions. Ce serait peut-être une piste pour résoudre la question du modèle économique de la presse en ligne, véritable Arlésienne…

Pour Laurent Chollat-Namy, «la DSI doit s'adapter à l'évolution rapide des offres des fournisseurs, mais aussi remettre du contrôle dans le système : si les utilisateurs achètent ce qu'ils veulent et utilisent leurs propres outils, le système devient vite inextricable». Chez Easyteam, l'intégrateur Oracle, les deux tiers des salariés apportent leur propre matériel ; la DSI assure la sécurité et le bon fonctionnement du Bring Your Own Device (BYOD). Ainsi, le réseau social d'entreprise privé Yammer a remplacé l'Intranet. Nicolas D'Ambrosio, directeur SI et marketing d'Easyteam en est intimement persuadé : «La mobilité va faire bouger les lignes. Etre toujours connecté, partout est essentiel. La 4G devrait modifier notre façon de travailler.»

Le DSI, la tête dans le nuage

Les DSI apparaissent pragmatiques, mais aussi parfois rêveurs quant aux possibilités du Cloud. Chez Innothera, un Cloud privé depuis trois ans et demi permet d'assurer l'optimisation des données et le Plan de Reprise d'Activité (PRA). Pour son DSI, M. Trignan, «un Cloud externe est trop soumis aux aléas des réseaux télécom. Dernière mise en œuvre, le déploiement de l'application de gestion de la relation client de SAP sur notre Cloud interne, sachant que la capacité à bien vendre est stratégique, ce n'est pas une externalisation applicative comme une autre.»

Les serveurs d'Easyteam, sont chez Orange et OVH et virtualisés, et le réseau est fibré chez Orange. L'intégrateur Oracle dispose d'un Cloud hybride selon le niveau de criticité des données. «Les coûts sont maîtrisés, et nous aidons les services commerciaux et administratifs à aller plus vite et à être plus efficaces», analyse Nicolas d'Ambrosio, directeur SI et marketing de l'entreprise.

Hervé Guehl, DSI de Picard, nuance : «Il faut savoir où positionner le curseur : le Cloud doit être bordé en termes de contrat et de repli, si la solution ne marche pas. Attention à l'externalisation en général : ça peut coûter plus cher sans un meilleur service.» Christophe Begis, DSI en temps partagé chez Rougier, producteur et distributeur de bois tropical, qui bascule en 100% Cloud fin 2013, va dans le même sens: « Les gros hébergeurs ont un panel de services important. Il faut bien choisir son prestataire Cloud et s'assurer contractuellement qu'on peut en changer sans trop de difficultés. Au final, le Cloud crée de l'agilité dans le SI, avec des services obtenus plus rapidement.»

Frédéric Lapeyre, directeur des opérations de Mondadori, qui commence aujourd'hui des projets Cloud (messagerie, stockage, sécurité) est confiant : «J'apprécie le fait de payer ce qu'on consomme. Il faut acheter de façon intelligente, et alors le champ des possibles s'élargit.»

Manager en temps partagé en PME, deux fois plus passionnant

Christophe Begis est manager en temps partagé chez Référence DSI, qui fait travailler une vingtaine de DSI de cette manière, en les plaçant dans des PME ou des entreprises de taille intermédiaire (ETI). Ainsi, elles externalisent la fonction DSI quand elles n'ont pas forcément les moyens d'avoir un DSI senior. Il a été auparavant DSI de Vernet, équipementier automobile pendant cinq ans, puis de Man Camions et Bus (groupe Volkswagen) pendant deux ans. Aujourd'hui, il partage son temps entre Yves Cougnaud, constructeur de bâtiments modulaires, et Rougier, qui produit et commercialise du bois tropical. «En temps partagé, la capacité d'écoute est essentielle.»