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Interview Godefroy de Bentzmann, président de Syntec Numérique, président et co-fondateur de Devoteam

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Les sociétés de services, qui sont souvent dans l’ombre de la transformation numérique des entreprises, se portent bien. Précisions avec Godefroy de Bentzmann, président de Syntec Numérique et président de l’ESN Devoteam

« Les clients ont commencé à remettre de l’argent dans la machine »

Godefroy de Bentzmann

 

  • Quels résultats pour les ESN ?

Depuis 2013-2014, on constate un effet ciseau inversé. L’indice de confiance des clients dans le fait que leur budget IT et numérique va grossir augmente. Et en même temps, la perception d’un budget qui pourrait diminuer baisse. Une maturité progressive a monté en puissance chez les entreprises, et les grands groupes en particulier. Chacun veut profiter de l’avenir économique qui passe par les données. Avec cette prise de conscience, les clients ont commencé à remettre de l’argent dans la machine. Les directions générales veulent comprendre et prendre la vague du numérique, en s’en donnant les moyens, en investissant, en étant sûres qu’elles ont là un moteur, et non plus une contrainte, dans une DSI qui y contribue et retrouve du brio. Avec, outre le numérique, une problématique sur : comment je rationalise ce qui existe ?, comment j’expose le legacy ? Autant d’aspirations fortes sur lesquelles surfent les ESN.

  • Les entreprises ne sont-elles pas en train d’internaliser une partie des compétences ?

Les ESN surfent sur la rationalisation des infrastructures à travers les solutions dans le Cloud, la mise en œuvre de nouvelles solutions quand on peut les prendre en SaaS, le développement des plateformes d’e-commerce, et tout ce qui va pouvoir être agile, toutes les fonctionnalités que l’on vient « plugger » sur le legacy. C’est ce qui tire la croissance des ESN. Mais il y a un autre phénomène : en matière de numérique, les clients, qui veulent devenir aussi performants que les entreprises du Web, se remettent à embaucher, à internaliser, du moins en partie, des sujets qui sont clés pour eux et qu’ils ont besoin de maîtriser. Ils veulent un noyau de compétences chez eux.

  • N’est-ce pas un défi : la rareté des talents ?

Il y a une tension sur les compétences pointues, qui sont des profils recherchés. Il va y avoir une vraie concurrence, entre nos clients et les ESN. Et entre les ESN aussi. La montée en puissance des indépendants est par ailleurs un vrai sujet, sur lequel la législation du travail n’est pas faite. Il faut mieux les protéger, leur donner des droits. Des salariés, jeunes, qui mixent compétences métiers et digitales ont une vraie valeur, et vont avoir la tentation de quitter leur société pour se mettre à leur compte. Une multitude de jeunes vont se mettre en indépendants, malgré une réglementation du travail qui n’est pas favorable.

  • La rentabilité est-elle meilleure ?

La croissance générée est à 2,8 % cette année, et prévue à 3 % en 2017. Il y a de meilleures marges, mais plus de coûts. Ce qui explique que la rentabilité n’explose pas. On n’a pas les mêmes niveaux de marges. Mais rien de catastrophique. C’est un point qui n’est pas une inquiétude, c’est un constat. Le business est là, la pression sur les prix n’est plus la même. Les clients ne nous tordent plus le bras. La situation redevient plus équilibrée comparée aux dix dernières années. Pour 70 % des ESN, le prix n’est plus un sujet de préoccupation prioritaire.

  • Où en est l’offshore ?

L’offshore subit deux impacts : celui de l’infogérance, qui décroît, touchée par le Cloud et le SaaS, et celui de DevOps. Aujourd’hui, avec l’arrivée de DevOps, le fournisseur de services et d’applications va pouvoir mettre en production à jet continu et faire des enrichissements fonctionnels au long cours. Une transformation radicale de l’organisation des DSI, et une manière de faire impossible depuis le Bangalore. La tendance lourde aujourd’hui est de ramener les équipes au plus près des clients internes pour produire à jet continu des nouveaux usages, des corrections de difficultés, des bugs, etc.

  • Cette transformation apporte-wt-elle des changements chez les ESN ?

Cette transformation est aussi celle des modèles des ESN parce que la manière d’acheter de nos clients change. Il faut être capable de leur fournir des services qui répondent à leurs besoins. Il faut les accompagner sur DevOps, être capable de leur mettre en place des plateaux dans lesquels ils retrouveront 20 ou 30 % de leurs propres ressources accompagnées par celles des grandes ESN, les aider à migrer leurs grandes applications de legacy vers des modèles plus agiles. Et cela va continuer. Nous sommes au début de la transformation numérique, axée sur la rationalisation. L’IOT, l’intelligence artificielle… on est loin d’avoir commencé à engager les autres sujets.